Un haut fonctionnaire grec a dit que les deux parties avaient bien progressé et qu'Athènes voulait sceller un accord ce vendredi, sans pour autant céder à la pression de ses partenaires de la zone euro. "Nous avons couvert les quatre cinquièmes de la distance; ils doivent aussi couvrir un cinquième", a dit le haut fonctionnaire.

Jeroen Dijsselbloem, le président de l'Eurogroupe, a annoncé que le début de la réunion était repoussé d'une heure et demie à 15h30 GMT.

La Grèce a présenté jeudi à ses homologues de la zone euro une demande officielle de prolongation de six mois de l'accord d'aide financière mais Berlin y voyait un "cheval de Troie" destiné à lui épargner de respecter ses engagements, notamment en matière de réformes, selon un document préparé en vue de la réunion.

Une expression que n'a pas reprise à son compte la chancellerie ce vendredi, adoptant un ton plus conciliant que le ministre des Finances Wolfgang Schäuble, dont elle a cependant reconnu l'"excellent travail".

"La lettre du ministre des Finances grec montre clairement que la Grèce reste intéressée par un soutien de l'Union européenne", a observé Christiane Wirtz, porte-parole de la chancelière Angela Merkel. "La lettre est un bon signal qui nous autorise à poursuivre la négociation".

L'aide internationale sous supervision de la "troïka" (Union européenne, Fonds monétaire international, Banque centrale européenne) expire à la fin du mois et sans nouveaux financements la Grèce risque de se retrouver à sec d'ici la fin mars, estiment des sources bien informées.

"Le gouvernement grec a fait tout ce qu'il a pu à tous les niveaux afin de trouver une solution satisfaisante pour tous", a dit le porte-parole du gouvernement grec Gabriel Sakellaridis.

"Le gouvernement grec maintiendra sa position aujourd'hui, quoique les conditions permettant enfin de déboucher sur une solution aient évolué".

Selon le magazine allemand Der Spiegel, la Banque centrale européenne prépare en interne des plans d'urgence en cas de sortie de la Grèce de la zone euro.

"DANS LES HUIT JOURS"

Le ballet diplomatique destiné à prévenir un nouveau blocage a vu sa cadence s'accélérer: le Premier ministre grec Alexis Tsipras, élu sur sa promesse d'en finir avec l'austérité, a eu un entretien téléphonique de 50 minutes jeudi avec la chancelière allemande Angela Merkel.

Il a ensuite discuté avec le président français François Hollande qui a promis d'évoquer la question avec Angela Merkel lors de la venue de cette dernière à Paris vendredi.

La situation est suivie avec attention depuis Washington où le secrétaire au Trésor Jack Lew appelle de ses voeux au compromis dans la mesure où les Etats-Unis, qui comprennent qu'Athènes en ait assez de l'austérité, craignent qu'une rupture du dialogue n'affecte une économie mondiale faiblarde.

Günther Öttinger, représentant allemand de la Commission européenne, pense malgré tout qu'un accord risque d'attendre un nouveau sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro la semaine prochaine.

"Nous faisons tout pour que la Grèce reste dans la zone euro", a dit le responsable conservateur allemand, proche de Merkel, à la radio Deutschlandfunk. "A partir de là, je pense qu'un accord reste possible dans les huit jours qui viennent, par l'entremise d'une nouvelle réunion des chefs d'Etat et de gouvernement s'il le faut".

Jeroen Dijsselbloem, le président de l'Eurogroupe, a redit que ce vendredi était la date limite pour parvenir à un compromis car toute prolongation ou modification de l'accord de renflouement qui expire le 28 février nécessiterait le feu vert de plusieurs parlements nationaux.

Cela dit, ce ne serait pas la première fois qu'une date limite serait repoussée et Angela Merkel n'a donné son assentiment à des sauvetages financiers par le passé qu'au tout dernier moment, lorsqu'elle a pu convaincre les Allemands que l'avenir de la zone euro était en jeu.

PAS DE CONTRÔLE DES CHANGES

L'Allemagne est le premier créancier de la Grèce, avec 50 milliards d'euros dus conformément à sa participation au programme d'assistance de la troïka et un défaut de la Grèce accompagnée d'une sortie de la zone euro aurait un impact non négligeable sur elle.

Pourtant, soit pour des raisons tactiques soit par simple exaspération, Berlin s'est employé à faire circuler le message voulant qu'une sortie de la Grèce, quoique non souhaitable, serait supportable. Le ministre des Finances Wolfgang Schäuble faisait d'ailleurs remarquer le calme régnant sur les marchés financiers cette semaine.

De fait, les Bourses européennes étaient stables dans la matinée mais les coûts d'emprunt de certains pays périphériques de la zone euro étaient en hausse, attestant du climat d'incertitude lié à la question grecque.

Des responsables de la zone euro ont travaillé tard dans la nuit de jeudi pour rédiger un projet de communiqué de l'Eurogroupe mais rien ne dit a priori que le ministre des Finances grec Yanis Varoufakis le signera. Le texte est soigneusement gardé secret, de précédents documents ayant fait l'objet de fuites multiples.

Les responsables grecs s'emploient à convaincre la population qu'ils bataillent ferme dans l'intérêt du pays, accusant les précédents gouvernements d'avoir cédé à Berlin.

Mais dans l'intervalle, les retraits aux guichets des banques grecques continuent de plus belle même si le gouvernement assure qu'il n'imposera pas un contrôle des changes pour endiguer le mouvement.

Ces retraits ont atteint mercredi et jeudi leurs niveaux de janvier, mois durant lequel on estime qu'ils ont atteint 12 milliards d'euros, a dit un banquier à Reuters.

Il a précisé que les retraits avaient dépassé les 500 millions d'euros sur chacun des deux derniers jours, les Grecs étant particulièrement fébriles avant un week-end de trois jours, se rappelant la manière dont le contrôle des changes avait été mis en place à Chypre en 2013. Lundi sera férié en Grèce.

(Avec Paul Taylor, Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Véronique Tison)

par Jan Strupczewski et George Georgiopoulos