PARIS (Reuters) - Emmanuel Macron s'est dit prêt vendredi à discuter avec Vladimir Poutine en vue du déblocage des exportations de céréales ukrainiennes, dans le port d'Odessa notamment, mais il a exprimé des doutes sur la possibilité d'un accord.

"En lien direct avec le secrétaire général des Nations unies, essayer de trouver des solutions pour sortir des céréales d'Odessa peut justifier des discussions", a déclaré le chef de l'Etat lors d'une interview à BFM TV à son retour d'Ukraine.

"Je crois peu à cette voie pour être honnête avec vous, parce que j'ai déjà eu cette discussion il y a quelques semaines à peine avec le président Poutine et il n'a pas voulu suivre une résolution au Conseil de sécurité", a ajouté Emmanuel Macron.

La guerre entre la Russie et l'Ukraine, respectivement troisième et quatrième exportateurs mondiaux de céréales, a aggravé la hausse des prix des denrées alimentaires et met en péril les approvisionnements alimentaires mondiaux.

La Russie s'est emparée d'une grande partie de la côte ukrainienne et ses navires contrôlent la mer Noire et la mer d'Azov, bloquant les exportations agricoles de l'Ukraine et faisant grimper le coût des céréales.

Les Nations unies cherchent à mettre au point un mécanisme associant Kyiv, Moscou et la Turquie pour relancer les exportations de céréales depuis les ports ukrainiens de la mer Noire via des couloirs maritimes sécurisés.

L'OPTION ROUMAINE

D'un côté les stocks de céréales ukrainiens sont bloqués dans les silos ou les vraquiers des ports d'Ukraine tenus par l'armée russe, de l'autre les exportations russes de céréales sont considérablement freinées par les sanctions occidentales, ainsi que par la situation sécuritaire dans la mer Noire, où Moscou accuse l'armée ukrainienne d'avoir placé des mines flottantes.

Selon l'Association ukrainienne des producteurs de céréales, quelque 30 millions de tonnes de céréales sont actuellement stockées dans les zones tenues par l'Ukraine, sur une capacité totale d'environ 55 millions de tonnes, tandis qu'il existe une capacité de stockage de 13 à 15 millions de tonnes dans celles occupées par la Russie.

Sans accès à ses ports de la mer Noire, l'Ukraine pourra au mieux exporter 20 millions de tonnes de céréales, les itinéraires alternatifs routiers, fluviaux et ferroviaires limitant les livraisons à un maximum de 2 millions de tonnes par mois, selon l'association.

Ces chiffres sont à comparer aux 44,7 millions de tonnes exportées l'année dernière.

Emmanuel Macron a suggéré jeudi soir, lors d'une interview sur TF1 à Kyiv, un scénario qui ferait de la Roumanie "une espèce de point de liaison" pour les exportations, Odessa n'étant qu'"à quelques dizaines de kilomètres" de la frontière entre ce pays et l'Ukraine.

Selon le président français, passer par la Roumanie permettrait d'accéder au Danube et aux chemins de fer pour acheminer des cargaisons de céréales.

La Roumanie, a-t-il précisé, "est en train de faire les investissements" pour "constituer une espèce de point de liaison", avec l'aide de la France notamment.

(Reportage John Irish, rédigé par Matthieu Protard, édité par Sophie Louet)