New York (awp/afp) - Donald Trump a été reconnu jeudi coupable à son procès pénal à New York, une première pour un ex-président américain et un séisme pour le milliardaire qui se dit "innocent" et entend retourner à la Maison Blanche.

Ce verdict sans précédent, aux conséquences politiques imprévisibles, n'empêchera pas le champion républicain d'être candidat à la présidentielle du 5 novembre face au démocrate Joe Biden, même en cas de condamnation à une peine de prison.

La peine, pour des paiements dissimulés à une star de films X, sera prononcée le 11 juillet par le juge Juan Merchan, quatre jours avant la convention du Parti républicain qui doit investir Donald Trump, 77 ans, comme candidat des conservateurs américains.

En attendant, il reste libre.

A la lecture du verdict de culpabilité pénale dans la salle d'audience du tribunal de Manhattan, l'ex-président est resté stoïque, les épaules basses.

En sortant du prétoire, celui qui en une décennie a bouleversé la démocratie américaine s'est décrit en "homme innocent", fustigeant un procès "truqué" qui serait une "honte".

Défiant, il a assuré que le "vrai verdict" tomberait le soir de l'élection, avant de rejoindre sa Trump Tower. Il y donnera vendredi à 11H00 (15H00 GMT) une conférence de presse.

"Nul n'est au-dessus des lois", a réagi la campagne de Joe Biden, prévenant que seul le "bulletin de vote" permettra que Donald Trump ne retourne pas dans le Bureau ovale.

Devant le palais de Justice de Manhattan, des New-Yorkais qui sortaient du travail se sont congratulés en apprenant le verdict historique, dont John Rudy, un homme "gay de 60 ans" pour qui il s'agit d'"un des rares moments où, vraiment, personne n'est au-dessus de la loi aux Etats-Unis d'Amérique".

Pour Matthew Turner, au contraire, ce verdict "va le rendre encore plus populaire aux yeux du peuple américain".

Conséquences incertaines

Après deux jours de délibérations, les 12 jurés ont déclaré à l'unanimité Donald Trump coupable de l'ensemble des 34 délits de falsifications de documents comptables, destinées à cacher un paiement de 130.000 dollars à l'actrice de films X Stormy Daniels pour éviter un scandale sexuel à la toute fin de sa campagne présidentielle de 2016.

"Vous avez accordé à cette affaire l'attention qu'elle méritait", a dit aux jurés, la voix tremblante, le juge Juan Merchan, que Donald Trump a souvent traité de "corrompu".

En théorie, l'ancien président encourt jusqu'à quatre ans de prison ferme, possiblement assortis d'une amende. Mais le juge pourrait aussi prononcer une peine de prison avec sursis probatoire, voire des travaux d'intérêt général.

Le verdict tombe en pleine campagne présidentielle, alors que se profilent le premier débat entre Donald Trump et Joe Biden, le 27 juin, et la convention républicaine à Milwaukee, du 15 au 18 juillet.

A cinq mois de l'élection, les conséquences sur le scrutin sont difficiles à prédire, d'autant que le magnat républicain devrait faire appel.

"Prisonnier politique"

Jeudi soir, sur sa page internet de levée de fonds, Donald Trump s'est dépeint en "prisonnier politique".

Depuis 2023, ses inculpations dans quatre affaires pénales distinctes et ses trois condamnations au civil -- des ennuis judiciaires qu'il qualifie de "chasse aux sorcières" orchestrée par les démocrates -- ne l'ont pas empêché de remporter haut la main la primaire de son parti.

Mais d'après plusieurs sondages, une partie de ses électeurs pourraient renoncer à voter pour lui.

Privé de campagne sur le terrain depuis mi-avril, Donald Trump s'est quand même servi de son procès pour capter l'attention médiatique, en parlant plusieurs fois par jour hors du prétoire. Il a cependant renoncé à témoigner durant son procès.

Pendant six semaines, les jurés ont plongé dans les coulisses de la campagne présidentielle de 2016, finalement victorieuse mais où la peur d'un scandale sexuel semblait omniprésente dans le camp Trump.

Stormy Daniels avait reçu, à quelques jours du scrutin, 130.000 dollars pour se taire sur une relation sexuelle qu'elle affirme avoir eue avec Donald Trump en 2006, quand il était encore un magnat de l'immobilier et du divertissement et qu'il était déjà marié à son épouse Melania.

Le témoignage de l'ex-actrice a été un des points d'orgue des débats. Elle a notamment raconté en détail cette relation sexuelle, selon elle consentie mais où le "rapport de force" était "déséquilibré". Donald Trump nie que cet épisode ait eu lieu.

"Vérité"

Les 130.000 dollars avaient été versés à l'actrice par l'ancien homme de confiance du milliardaire, Michael Cohen, devenu depuis son ennemi juré.

Ce dernier a sobrement salué "un jour important" pour la "vérité".

Quand Michael Cohen s'était fait rembourser en 2017, par plusieurs chèques signés de Donald Trump, alors à la Maison Blanche, les dépenses avaient été maquillées en "frais juridiques" dans les comptes de la Trump Organization.

Pour les procureurs, derrière ces falsifications comptables, "le coeur de (l')affaire, (était) un complot et une dissimulation" pour gagner l'élection contre Hillary Clinton en 2016.

La défense avait balayé cette thèse, assurant que Donald Trump, devenu président, ne connaissait pas les détails de la paperasse quand il a rémunéré Michael Cohen.

afp/al