Les deux établissements français, qui ont aussi publié des résultats trimestriels en forte hausse, donnent désormais la priorité au renforcement de leurs fonds propres et à leurs métiers stratégiques après plusieurs années passées à essayer de proposer une palette complète de services financiers.

La "négociation exclusive" annoncée prévoit la cession par Crédit agricole CIB à Société générale de sa participation de 50% dans Newedge pour 275 millions d'euros.

Dans le même temps, CASA s'engagerait à acquérir une participation supplémentaire de 5% dans Amundi pour 337,5 millions d'euros. A l'issue de la transaction, CASA contrôlerait 80% d'Amundi et Société générale 20%.

Cet arbitrage se veut une réponse à la pression d'investisseurs en quête de modèles économiques plus clairs à l'heure où l'Europe continue d'élaborer son union bancaire et où les exigences réglementaires se font plus fortes.

Les actions Société générale et CASA sont recherchées à la Bourse de Paris, gagnant chacune plus de 3% à 13h10, et surperforment largement l'indice sectoriel des banques de la zone euro (+1%).

"C'est positif pour CASA, qui compte sur l'assurance et la gestion pour 40% de ses revenus et qui se retire de beaucoup d'activités de marché et de dérivés. Pour SocGen, il doit y avoir des synergies aussi, les banques françaises sont des banques de plus en plus différentes", souligne Yannick Naud, gérant chez Glendevon King Asset Management.

Les deux banques entendent maintenir leurs accords de distribution des produits Amundi dans leurs réseaux respectifs jusqu'en 2019 mais actent bel et bien des choix différents pour l'avenir.

La fusion de leurs activités dans le courtage et dans la gestion d'actifs a alimenté par le passé les spéculations sur un rapprochement plus large, en particulier dans la banque de financement et d'investissement.

Avec l'affaire Kerviel qui a contraint la Société générale à lancer en 2008 une augmentation de capital après la découverte d'une perte de trading de 4,9 milliards d'euros, le Crédit agricole a longtemps fait figure de cheval blanc tout désigné en cas d'éventuel raid hostile, notamment de la part de BNP Paribas.

En décidant de prendre le contrôle intégral de Newedge, Société générale entend demeurer un grand acteur du marché des dérivés sur lequel il est déjà très actif.

En sortant de Newedge, Crédit agricole confirme de son côté son recentrage sur ses métiers de financement et de conseil et la réduction de ses activités de marché, engagée en 2010.

Ailleurs en Europe, les établissements de crédit sont également sommés d'effectuer des choix. L'allemand Commerzbank a notifié jeudi son intention de céder des portefeuilles non stratégiques, ce qui contribue à un bond de 11% du titre à la Bourse de Francfort, tandis que le néerlandais ING veut hâter sa restructuration.

CASA REPOUSSE LA PUBLICATION DE SON PLAN À 2014

La confiance des investisseurs passant aussi par une visibilité renforcée, les banques françaises continuent de travailler à de nouveaux plans stratégiques pluriannuels.

Le groupe BPCE , maison mère de Natixis, sera le premier à dévoiler ses intentions le 13 novembre, avant BNP Paribas et Société générale en 2014.

CASA, qui avait initialement prévu de communiquer "à l'automne 2013", a repoussé sa présentation au 20 mars prochain. Au cours d'une conférence téléphonique, le directeur général Jean-Paul Chifflet a justifié son choix de décaler cette présentation par la communication, jeudi, d'un calendrier de solvabilité détaillé.

Le ratio common equity tier one "fully loaded" Bâle III du groupe Crédit agricole - les régulateurs privilégient les données du groupe et non celles de la structure cotée - atteignait 10,5% fin septembre. La banque prévoit que celui-ci s'établisse à 11% le 1er janvier 2014, à 12% le 31 décembre de la même année et à 13% fin 2015.

Fort du renforcement de ses ratios prudentiels, Société générale a de son côté confirmé l'hypothèse d'un taux de distribution du bénéfice de 25% en fin d'exercice, sans recours à un éventuel paiement en actions.

Entre juillet et septembre, le résultat net de CASA s'inscrit à 728 millions d'euros - à comparer à une perte de 2,85 milliards un an plus tôt - tandis que le produit net bancaire progresse de 21,6% à 3,97 milliards.

Société générale a vu son bénéfice net multiplié par près de six sur la période, à 534 millions d'euros, et ses revenus croître de 6% à 5,7 milliards. Les provisions destinées à couvrir les risques sur le crédit ont toutefois grimpé de 22%.

Edité par Dominique Rodriguez

par Matthias Blamont et Matthieu Protard