* La France et l'Autriche perdent leur triple A, perspective négative

* L'Allemagne garde son triple A avec une perspective stable

* Sur 16 pays revus par S&P, 14 ont une perspective négative (Actualisé avec précisions, citations)

par Walter Brandimarte et Steven C. Johnson

NEW YORK, 13 janvier (Reuters) - Standard & Poor's a abaissé vendredi la note de la moitié des pays de la zone euro et ôté son précieux triple A à la France, s'interrogeant sur la stratégie des dirigeants politiques des pays de l'euro face à la crise, tout en maintenant le AAA de l'Allemagne.

En déclassant neuf des 17 pays de la zone euro, l'agence américaine a indiqué que ses dirigeants politiques n'avaient pas fait suffisamment pour résoudre la crise et même ne prenaient pas en compte une cause clé du problème : les fortes disparités en matière de compétitivité économique au sein des pays utilisant la monnaie unique.

"Nous estimons qu'un processus de réforme basé sur le seul pilier de l'austérité fiscale risque de devenir contraire au but recherché alors que la demande intérieure baisse en même temps qu'augmentent les préoccupations des consommateurs au sujet de la sécurité de l'emploi et de leur revenu disponible, érodant les recettes fiscales des pays", déclare S&P dans son communiqué.

Tout en donnant crédit à la Banque centrale européenne pour soutenir la confiance des marchés via des prêts d'urgence aux banques de la zone euro, l'agence de notation estime que les initiatives politiques qui ont été prises par les responsables européens ces dernières semaines pourraient être "insuffisantes" pour résoudre la crise.

Cet abaissement massif de notes en ce vendredi 13 fait suite à la décision de S&P en août de supprimer la notation maximale aux Etats-Unis, décision qui elle aussi avait été associée par l'agence à une impasse politique - au moins partiellement - à savoir l'incapacité des élus du Congrès à se mettre d'accord sur la manière de réduire le déficit budgétaire.

LA FRANCE ET L'AUTRICHE ABAISSÉES A AA+

Les dirigeants européens, et notamment l'Allemande Angela Merkel, ont pressé les pays de se serrer la ceinture avec une hausse de la fiscalité et de fortes réductions des dépenses pour réduire des déficits budgétaires massifs. Mais cela a augmenté l'inquiétude des marchés qui se sont demandé si tous ces pays pourraient recouvrer la santé, ce qui s'est traduit par une montée des coûts d'emprunts pour des Etats déjà très endettés.

"A notre avis, il est de plus en plus probable que les coûts de refinancement de certains pays puissent rester élevés, que la disponibilité du crédit et la croissance économique puissent encore ralentir et que les tensions en matière de conditions de financement puissent persister", indique S&P.

Sur les neuf pays déclassés, cinq voient leur note rétrogradée d'un cran - France, Autriche, Malte, Slovaquie et Slovénie et quatre - Espagne, Italie, Portugal et Chypre - se retrouvent avec une note abaissée de deux crans.

Sur ces neuf, deux pays perdent leur triple A : la France et l'Autriche. La note de chacun d'eux est abaissée d'un cran à AA+ et elle est assortie d'une perspective négative, ce qui signifie qu'elle est susceptible d'être à nouveau abaissée dans les deux ans.

Sept pays voient leur note confirmée dont l'Allemagne. Sur ces sept pays, cinq ont des perspectives négatives.

L'Allemagne, première puissance économique de la zone euro, est le seul pays qui émerge sans dommage de ce vaste réexamen des notations. Elle conserve son triple A avec une perspective stable. La Slovaquie bénéficie également d'une perspective stable. Le triple A de la Finlande, des Pays- Bas et du Luxembourg est également confirmé mais la perspective attachée à ces notes est négative.

Le FESF POURRAIT CONSERVER SA NOTE

Après ces rétrogradations, l'Italie a par exemple la même note - BBB+ - que le Kazakhstan, tandis que le Portugal est désormais noté en catégorie spéculative (BB).

Au total, ce sont 14 pays sur les 16 pays dont la situation a été réexaminée - tous les pays de la zone euro sauf la Grèce qui n'était pas concernée - dont la note est mise sous perspective négative. Cela implique, précise S&P, qu'il y a "au moins une chance sur trois que leur note soit abaissée en 2012 ou 2013".

Le ministre français de l'Economie François Baroin s'est employé à dédramatiser la décision de S&P pour la France en indiquant que ce n'était "pas une catastrophe".

La décision risque d'accentuer les problèmes des pays de la zone euro dans la mesure où elle risque d'accroître les coûts de financement sur les marchés d'un certain nombre de pays.

Pour S&P, le principal risque pour la zone euro est "la possibilité d'une poursuite de la détérioration de la situation budgétaire" dans un environnement récessif.

La décision de S&P pourrait aussi être suivie par une série d'abaissements de notes d'organismes publics, de grandes banques européennes ou de sociétés, notamment du véhicule créé pour sauver les pays de la zone euro, le Fonds européen de stabilité financière (FESF).

Dans un entretien à Reuters, John Chambers, président du comité des notations souveraines de S&P, a indiqué que le FESF pourrait conserver la note maximum si l'Allemagne et les autres pays notés triple A de la zone euro accroissaient leur soutien financier.

Les ministres des Finances de la zone euro ont fait part vendredi soir de leur volonté de conserver la note AAA du Fonds européen de stabilité financière. (voir )

Après la décision prise vendredi soir par S&P, il n'y a plus que 14 pays dans le monde notés triple A par Standard & Poor's.

S&P prive la France de son triple A

Pour le communiqué de S&P (en anglais), cliquer sur

Pour le communiqué sur la France (Danielle Rouquié pour le service français)