Londres (awp/afp) - Les Britanniques rognent sur leurs courses alimentaires pendant que leur gouvernement augmente les impôts et coupe dans les dépenses publiques: dans une économie en crise, le Royaume-Uni se serre la ceinture.

"Les volumes des ventes alimentaires poursuivent leur tendance à la baisse amorcée à l'été 2021", en raison de "l'augmentation du coût de la vie et des denrées alimentaires", indique l'Office national des statistiques (ONS) vendredi dans un communiqué.

Les ventes en volume des magasins d'alimentation ont diminué de 1% en octobre et sont inférieures de 4,1% à leur niveau d'avant la pandémie de Covid-19, face à une inflation au plus haut en plus de 40 ans à plus de 11%.

L'économie britannique est entrée en récession selon l'OBR, l'organisme de prévisions budgétaires public, frappée par la guerre en Ukraine et les retombées de la pandémie ou du Brexit.

Le ministre britannique des Finances Jeremy Hunt a dévoilé jeudi une potion amère de 55 milliards de livres de mesures pour remettre les finances publiques d'aplomb et lutter contre l'inflation.

Celle-ci va entraîner une chute record du niveau de vie en deux ans, malgré les aides gouvernementales, effaçant huit années de progression, a prévenu l'OBR jeudi.

"Ce qui inquiète les gens, c'est la hausse du coût de la vie, l'augmentation du prix des courses hebdomadaires, des emprunts immobiliers et de leurs factures d'énergie", a indiqué vendredi M. Hunt sur Sky News, répétant que "les décisions difficiles annoncées" devraient freiner l'envolée des prix.

M. Hunt veut regagner la confiance des marchés, affolés par les annonces budgétaires massives non financées de la précédente Première ministre Liz Truss, qui avaient fait plonger la livre sterling à son plus bas historique et s'envoler les coûts d'emprunt de l'Etat et des Britanniques.

Conséquence: son budget de rigueur devrait faire grimper la pression fiscale au Royaume-Uni à 37% du PIB d'ici 2028, "son plus haut niveau depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale", selon l'OBR.

"Après les élections"

Pour autant, "la grande majorité" de la consolidation budgétaire a été repoussée à "après les prochaines élections" nationales (attendues en 2024), remarque Paul Johnson, directeur du centre de réflexion Institute for Fiscal Studies (IFS), dans un communiqué vendredi.

Les coupes dans les budgets ministériels doivent en effet intervenir seulement après cette date - mais ces derniers n'augmenteront pas, d'ici-là, au-delà de ce qui était déjà prévu, malgré l'inflation, à l'exception de la Santé et l'Education, qui voient leurs enveloppes gonflées.

"Vu l'état précaire de l'économie, l'incertitude qui entoure les prévisions et le fait que la forte inflation rend déjà difficile le maintien des dépenses" ministérielles à leur niveau prévu, "cela pourrait être le bon équilibre", juge M. Johnson.

Par ailleurs, le Chancelier a cherché à épargner les Britanniques les moins aisés. Les retraités vont voir les pensions versées par l'Etat augmenter en ligne avec l'inflation, de même que les bénéficiaires de certaines allocations. Le salaire minimum sera revalorisé à partir d'avril.

"Les perspectives de consommation au Royaume-Uni continuent de souffrir d'une série de vents contraires", l'inflation mais aussi l'augmentation des coûts des crédits immobiliers, qui "pèseront probablement sur le pouvoir d'achat jusqu'à l'année prochaine", complète Martin Beck, économiste d'EY Item Club.

Les ventes au détail dans le pays dans leur ensemble ont toutefois connu un léger rebond en octobre (+0,6% en volume). Mais c'est surtout par effet de comparaison avec le mois précédent, marqué par un jour férié exceptionnel pour les funérailles d'Elizabeth II, selon l'ONS.

Les Britanniques ont peut-être aussi "commencé leurs achats de Noël un peu plus tôt, dans l'espoir de répartir le coût d'achat des cadeaux" sur plusieurs mois, estime Danni Hewson, analyste de AJ Bell.

Selon elle, les données publiées vendredi montrent aussi que les acheteurs ont privilégié les biens d'occasion", moins chers que le neuf, poursuit l'analyste.

afp/lk