Zurich (awp) - Pascal Vandenberghe, directeur des librairies Payot, a déposé une plainte à la Commission de la concurrence (Comco) contre le groupe Madrigall, holding de l'éditeur Gallimard, fait savoir le journal Le Temps mercredi. Il dénonce une surmajoration du prix des livres et une distorsion de la concurrence.

Le libraire lausannois s'est appuyé sur la révision de la loi fédérale sur les cartels (LCart), entrée en vigueur le 1er janvier dernier, pour contester les prix pratiqués par les diffuseurs français, qui, pour certains types d'ouvrages, peuvent être de 60 à 80% supérieurs à ceux du pays voisin.

"Si le client final voit une différence importante avec le prix d'origine", inscrit en euros, le libraire la constate aussi dans ses prix d'achat, "entre 35 et 50% plus élevé" que s'il achetait les ouvrages en France". Le patron estime qu'un surcoût de 15% "serait acceptable, puisqu'il y a un maillon supplémentaire, le distributeur suisse". En revanche, "une majoration supérieure à 15% génère un bénéfice indu réalisé sur le dos du marché suisse, qui s'apparente, pour dire les choses clairement, à du racket."

Cette situation de "rente à vie" pour les groupes français d'édition a encore été accrue cette année avec l'évolution du taux de change entre le franc et l'euro, poursuit M. Vandenberghe. "La différence entre le taux moyen euro/franc de 2021 et celui de 2022 augmentera mécaniquement leur bénéfice cette année [...] de quelque 2 ou 3 millions de francs suisses".

Le patron de Payot dit avoir tenté de négocier avec le groupe éditorial Madrigall, qui comprend notamment Gallimard et Flammarion, mais "après plus de huit mois de tergiversations [...] et de demandes restées sans réponse [...] je me suis décidé à sonner la fin de la récréation".

M. Vandenberghe dénonce également une distorsion de la concurrence avec le groupe Fnac Suisse. Depuis 2012, la "filiale d'une société française importe les livres directement depuis la France et bénéficie de prix d'achat français très inférieurs", poursuit-il.

Il explique vouloir "assurer une meilleure assise financière pour Payot, qui depuis des années est sur le fil du rasoir, en raison de charges élevées et de marges insuffisantes", "baisser sensiblement les prix" mais aussi "les harmoniser".

Contacté par le quotidien, Antoine Gallimard, président de Madrigall, n'a pas fait de commentaire.

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