(Actualisé avec nouvelle déclaration et accord sur le renforcement des effectifs dans l'Est)

BRUXELLES, 5 février (Reuters) - Plusieurs ministres de la Défense de pays de l'Otan ont exprimé jeudi, lors d'une réunion à Bruxelles, leur hostilité à l'envoi d'armes à l'armée ukrainienne, une idée que Washington dit examiner.

Le président ukrainien Petro Porochenko a demandé à l'Alliance atlantique de lui fournir des armes pour faire face à la rébellion séparatiste pro-russe dans l'est de son pays.

"S'il y a encore plus d'armes dans cette région, cela ne nous rapprochera nullement d'une solution et ne mettra pas fin aux souffrances de la population", a dit aux journalistes la ministre allemande de la Défense, Ursula von der Leyen.

"Nous devons exercer de fortes pressions sur les séparatistes et sur la Russie, politiquement et économiquement, pour trouver une solution négociée autour d'une table et non sur le champ de bataille", a-t-elle poursuivi. "Prendre le risque d'une escalade potentielle, ce n'est pas la solution. Il faut une solution politique durable."

Pour son homologue néerlandaise, Jeanine Hennis-Plasschaert, également, "le dialogue politique est la seule voie pour sortir de cette crise".

La plupart des pays de l'Otan, a-t-elle ajouté, "et en particulier les Pays-Bas, insisteront pour que le soutien apporté à l'Ukraine ne prenne pas des formes létales".

L'Italienne Roberta Pinotti a clairement exprimé l'hostilité de Rome à des livraisons d'armes. "Nous devons faire baisser la température, pas la faire monter", a-t-elle souligné.

Le secrétaire britannique à la Défense, Michael Fallon, a évoqué une aide "non létale en matière de formation et d'équipement afin d'aider les Ukrainiens à mieux assurer leur protection".

Le ministre lituanien Juozas Olekas a quant à lui indiqué que Vilnius fournissait d'ores et déjà à l'armée ukrainienne "certains éléments" réclamés par Petro Porochenko, sans préciser lesquels.

RENFORCEMENT DE LA PRÉSENCE À L'EST

Le secrétaire américain à la Défense a pour sa part éludé la question. "Nous ne devons pas oublier (...) ce que le président Obama et les dirigeants européens ont dit (...) Cette crise ne sera pas résolue militairement", a souligné Chuck Hagel.

Le général américain Philip Breedlove, commandant suprême des forces de l'Otan en Europe, s'est dit "fortement préoccupé" par la fourniture d'armes lourdes russes aux rebelles et a souligné que le peuple ukrainien avait le droit de se défendre.

Il a cependant ajouté qu'il n'y avait pas de solution militaire à la crise et qu'il fallait créer "les conditions pour amener toutes les parties à la table des négociations". "Les armes ne changeront rien à cela", a-t-il insisté.

Ashton Carter, que Barack Obama souhaite porter à la tête du ministère américain de la Défense, s'est dit favorable, lui, à l'envoi d'armes en Ukraine. "Nous devons aider les Ukrainiens à se défendre eux-mêmes. Je penche pour des livraisons d'armes en leur faveur, y compris des armes létales", a-t-il déclaré mercredi lors de son audition au Sénat, qui doit se prononcer sur sa nomination.

A Moscou, le ministère russe des Affaires étrangères a souligné que toute livraison d'armes létales aux forces de Kiev serait considérée comme une menace pour la sécurité de la Russie.

"Etant donné les plans revanchards du 'parti de la guerre' à Kiev, cela ne conduirait qu'à une escalade et menacerait la sécurité de la Fédération de Russie", a dit Alexandre Loukachevitch, porte-parole du ministère.

Les ministres de la Défense l'Otan sont par ailleurs convenus de renforcer la présence de l'Alliance en Europe de l'Est en y établissant un réseau de petits centres de commandement.

Les ministres ont décidé de plus que doubler les effectifs de la force de réaction rapide existante, qui passent de 13.000 à 30.000 hommes, et de créer une autre force d'intervention encore plus réactive, opérationnelle en quelques jours, forte de 5.000 hommes et dotée d'un appui aérien et naval.

"Les Russes doivent entendre le message que nous leur adressons, ils doivent renoncer à leur agression contre l'Ukraine", a déclaré le ministre canadien de la Défense, Rob Nicholson. (Adrian Croft et David Alexander, avec Ole Mikkelsen à Copenhague et Gabriela Baczynska à Moscou; Guy Kerivel et Jean-Philippe Lefief pour le service français)