La conférence automobile internationale de Téhéran se tiendra moins d'une semaine après la signature à Genève d'un accord sur le programme nucléaire iranien. Téhéran a promis de limiter l'enrichissement d'uranium en échange d'un allègement des sanctions économiques, notamment dans le secteur automobile, qui pourrait intervenir dans les prochaines semaines.

PSA Peugeot Citroën et Renault envoient des représentants au salon de Téhéran, programmé avant l'accord de dimanche dernier. Les deux français, qui n'ont suspendu leurs activités avec l'Iran qu'en 2012 et 2013 respectivement, semblent en mesure de renouer les liens plus rapidement que d'autres, ce qui leur donnerait un avantage compétitif avant l'ouverture totale du marché à la concurrence étrangère.

"Si les conditions étaient à nouveau réunies, il faudrait quelques semaines pour réactiver l'activité", a indiqué PSA, dont le directeur des opérations internationales, Yves Moulin, a accueilli avec satisfaction l'accord de Genève.

Les français auront cependant fort à faire pour maintenir leurs positions face à la concurrence des asiatiques et des américains.

Chez ces derniers, absents depuis la révolution islamique de 1979, officiellement rien n'a changé. D'autant qu'ils restent soumis aux dispositions spécifiques de l'embargo décrété par les Etats-Unis. Mais Ford semble avoir déjà noué des contacts sur place, afin d'être prêt à la moindre ouverture.

PSA a suspendu ses exportations vers l'Iran en février 2012. Le groupe a toujours expliqué cette décision, annoncée au moment de la signature de son alliance avec l'américain General Motors, par l'impossibilité d'accéder au système bancaire international dans le cadre des sanctions contre Téhéran.

GROS POTENTIEL

Les conditions précises et le calendrier détaillé de l'assouplissement des relations avec l'Iran restent à préciser. Selon l'accord intérimaire de six mois conclu à Genève, l'interdiction d'accéder au système bancaire international resterait en vigueur tant que les soupçons sur les intentions réelles de l'Iran en matière de nucléaire n'auraient pas été totalement dissipées.

"Il serait contradictoire d'autoriser l'Iran à importer à nouveau des pièces détachées pour faire du montage, et de ne pas donner l'autorisation à l'Iran de les payer", souligne Thierry Coville, chercheur spécialiste du pays à l'Iris (Institut de relations internationales et stratégique).

En 2011, PSA avait commercialisé 458.000 véhicules en Iran. Le pays ne pesait alors que 1,5% à 2% de son chiffre d'affaires mais constituait son deuxième marché en volume derrière la France.

Dans un contexte de situation financière très fragile chez PSA, l'arrêt de l'activité a de surcroît coûté plus de dix millions d'euros de bénéfice opérationnel par mois.

Renault, qui envoie lui aussi des émissaires à Téhéran, a suspendu son activité en Iran l'été dernier lors du dernier épisode de durcissement des sanctions internationales. Ce qui l'a conduit à provisionner 512 millions d'euros qui ont pesé sur son résultat d'exploitation du premier semestre.

"Nous n'avons jamais dit que c'était la fin de notre activité en Iran", dit-on chez Renault. "Renault ne reste pas les bras croisés."

Le groupe a écoulé l'an dernier plus de 100.000 véhicules sur le marché iranien, des modèles Logan et Mégane.

Au-delà des enjeux diplomatiques, aucun constructeur automobile ne peut ignorer un marché qui pesait encore 1,6 million d'unités en 2011, avec un parc très vieillissant et une classe moyenne en mal d'équipement.

Grâce à son partenariat avec le grand constructeur public Iran Khodro, hérité du rachat de Chrysler Europe en 1978, PSA détenait encore 30% du marché iranien en 2011.

Edité par Dominique Rodriguez

par Gilles Guillaume et Laurence Frost