(Actualisé tout du long)

par John Irish, Andrius Sytas et Sabine Siebold

VILNIUS, 10 juillet (Reuters) - Les pays membres de l'Otan étaient toujours divisés lundi sur le cadre à mettre en place en vue d'une adhésion future de l'Ukraine à la veille d'un sommet de deux jours à Vilnius, en Lituanie, lors duquel ils devraient apporter des garanties sécuritaires à Kyiv.

Signe d'une volonté de lever les obstacles à une telle adhésion, le secrétaire général de l'Alliance transatlantique a annoncé avoir proposé le retrait d'obligations traditionnelles fixées aux pays candidats par le Plan d'action d'adhésion (MAP), qui regroupe des objectifs politiques, économiques et militaires à remplir au préalable - comme l'ont fait dans le passé les autres pays d'Europe de l'Est.

Jens Stoltenberg a fait savoir lundi que des réunions supplémentaires sur l'Ukraine auraient lieu à Vilnius en amont du sommet. Il s'est aussi entretenu en fin de journée avec le président turc Recep Tayyip Erdogan et le Premier ministre suédois, Ulf Kristersson, à propos de l'adhésion de la Suède, bloquée par la Turquie et la Hongrie.

Le président ukrainien Volodimir Zelensky, qui devrait prendre part au sommet, a demandé que soit donné à cette occasion un "signal clair" que Kyiv intégrera l'Otan dès que la guerre avec la Russie sera terminée. Il a réclamé dans ce laps de temps, dès à présent, de nouvelles garanties sécuritaires.

Si les pays d'Europe de l'Est membres de l'Otan soutiennent la requête de l'Ukraine, d'autres, comme les Etats-Unis et l'Allemagne, se montrent plus prudents et veulent éviter toute démarche qui pourrait entraîner l'Alliance dans une guerre directe avec la Russie.

D'après le ministre ukrainien des Affaires étrangères, il y a un consensus au sein de l'Otan sur le retrait des obligations du MAP. Dmytro Kouleba a ajouté cependant sur Twitter que le moment était propice à "offrir de la clarté sur l'invitation à l'Ukraine à devenir membre".

Jens Stoltenberg a indiqué en conférence de presse qu'aucune "décision finale" n'avait été prise pour l'heure mais il a affiché sa confiance sur le fait "que nous serons unis et aurons un message fort pour l'Ukraine".

Le président russe Vladimir Poutine a justifié sa décision d'envoyer l'an dernier des troupes en Ukraine, pour ce qu'il a décrit comme une "opération militaire spéciale", par l'élargissement de l'Otan près des frontières russes, disant craindre pour la sécurité de son pays.

NÉGOCIATIONS SUR DES FORMULATIONS DU COMMUNIQUÉ

Des diplomates ont indiqué que plusieurs formulations étaient en discussions en amont du sommet, telles que "la juste place de l'Ukraine est au sein de l'Otan" et que l'Ukraine rejoindra l'Alliance "lorsque les conditions le permettront", afin de convaincre l'ensemble des 31 membres.

En avril 2008, lors d'un sommet à Bucarest, les débats au sein de l'Otan avaient débouché sur une promesse que l'Ukraine et la Géorgie rejoindraient à terme l'Alliance, sans donner de calendrier ni de cadre à leur adhésion.

Certains voisins de l'Ukraine veulent que le sommet de Vilnius s'accorde pour mentionner dans son communiqué final une "invitation". Des discussions étaient toujours en cours sur les conditions à apporter au processus et sur un dispositif pour surveiller les progrès de Kyiv.

Les négociations entre diplomates devraient se poursuivre dans la nuit de lundi à mardi, avec l'espoir de sortir de l'impasse avant que les dirigeants de l'Otan ne débutent leur sommet, contrairement à 2008.

Les principaux alliés occidentaux de l'Ukraine finalisaient par ailleurs un cadre prévoyant des garanties sécuritaires sur le long terme envers Kyiv. Des diplomates européens ont déclaré qu'une annonce pourrait intervenir seulement après le sommet de Vilnius pour ne pas être perçue comme liée à l'Otan.

Jens Stoltenberg espère sortir aussi de l'impasse sur l'adhésion de la Suède, alors que

Recep Tayyip Erdogan

a surpris en déclarant lundi que le Parlement turc ratifierait cette adhésion seulement une fois que l'Union européenne aura ouvert la voie à une entrée de la Turquie.

Une adhésion à l'Alliance requiert le feu vert de tous ses membres.

Interrogé sur les commentaires du président turc avant une réunion trilatérale, Jens Stoltenberg a déclaré que la Suède pourrait rejoindre l'Otan dès le sommet de Vilnius malgré les réticences d'Ankara. Stockholm a selon lui rempli les conditions nécessaires, a-t-il ajouté.

Les alliés de l'Otan sont par ailleurs parvenus lundi à un accord sur de

nouveaux plans de défense régionaux

dans l'hypothèse d'une attaque de la Russie, surmontant un blocage de la Turquie, ont déclaré trois diplomates à Reuters.

L'Alliance transatlantique n'avait plus de plans de défense à grande échelle depuis la fin de la Guerre froide. (Reportage Andrius Sytas, Sabine Siebold et John Irish, avec Andrew Gray et le bureau de Kyiv; version française Jean Terzian, édité par Bertrand Boucey)