* Les Républicains minimisent, l'UDI s'étonne

* Hamon, Le Pen et Mélenchon confortés dans leur opposition

* L'exécutif espère que ce ralliement en provoquera d'autres (Actualisé avec déclarations Macron à Berlin)

par Jean-Baptiste Vey et Marine Pennetier

PARIS, 15 mai (Reuters) - Emmanuel Macron a nommé lundi le député Les Républicains (LR) Edouard Philippe Premier ministre, poursuivant sa logique de recomposition politique au détriment des partis traditionnels à moins d'un mois du premier tour des législatives.

Le chef de l'Etat et le nouveau locataire de Matignon travailleront mardi sur la composition du gouvernement, qui sera annoncée en fin de journée, avant la tenue du premier conseil des ministres à l'Elysée mercredi.

"La recomposition politique que j'ai entamée il y a plusieurs mois et qui a conduit à mon élection se poursuit et elle se fera dans le cadre de mon élection présidentielle et de ce que le peuple français a voulu", a expliqué Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse à Berlin, aux côtés d'Angela Merkel. "Ni plus, ni moins."

Enarque, proche des positions économiques d'Emmanuel Macron, Edouard Philippe devra, en cas de succès aux législatives, mener une série de réformes promises par le président pendant la campagne et déjà rejetées par plusieurs syndicats.

"Je suis un homme de droite", a-t-il déclaré lors de la passation de pouvoir avec Bernard Cazeneuve à Matignon, en saluant la détermination à servir l'intérêt général de son prédécesseur, qui s'était défini comme "homme de gauche".

Elu président à la faveur notamment d'un effondrement du Parti socialiste, Emmanuel Macron espère convaincre d'autres personnalités de droite et du centre de le rejoindre pour constituer une majorité. Avant ou après les législatives.

Misant sur un appel d'air, il a gelé 148 circonscriptions jusqu'à ce mercredi. Mais la bataille pour une majorité absolue s'annonce délicate, de l'avis même d'Edouard Philippe qui évoquait "un chemin étroit", dans une tribune publiée le 3 mai par Libération.

Si Emmanuel Macron l'emporte, "il devra transgresser", soulignait le député-maire du Havre. "Sortir du face-à-face ancien, culturel, institutionnalisé et confortable de l'opposition droite-gauche pour constituer une majorité d'un nouveau type. Son chemin sera étroit. Et risqué. On imagine mal le fameux 'système' se laisser faire."

LES RÉPUBLICAINS MINIMISENT

Le secrétaire général du parti Les Républicains, Bernard Accoyer, a minimisé "une décision individuelle", tandis qu'Alain Juppé, finaliste malheureux de la primaire de droite, souhaitait "bonne chance" à Edouard Philippe, tout en maintenant son soutien aux candidats Les Républicains aux législatives.

"Edouard Philippe est un ami et un homme de grand talent", a dit l'ancien Premier ministre. "Il a toutes les qualités pour assumer la fonction difficile que le président de la République vient de lui confier."

Le président de l'UDI, allié des Républicains aux législatives, Jean-Christophe Lagarde, a quant à lui jugé "curieux d'accepter d'être le chef des candidats qu'il n'a pas choisis et d'un projet qu'il n'a jamais défendu".

Le nom d'Edouard Philippe était revenu avec insistance ces derniers jours sans jamais être confirmé par l'entourage d'Emmanuel Macron, qui avait choisi d'entretenir le mystère tout en esquissant le portrait-robot du futur chef du gouvernement.

"Le choix du président s'est porté sur Edouard Philippe il y a quelques jours. Ils se sont vus à plusieurs reprises ces dernières semaines", a précisé Laurence Haïm, en assurant que "personne n'était dans la confidence en dehors du secrétaire général de la présidence et du secrétaire général d'En Marche!".

Benoît Hamon, candidat socialiste arrivé cinquième à l'élection présidentielle, a estimé après la désignation du Premier ministre que "la place de la gauche n'est ni dans son gouvernement ni dans la majorité qui pourrait le soutenir".

Selon Marine Le Pen, battue par Emmanuel Macron au second tour, cette nomination "confirme l'existence d'un système UMPS".

"C'est l'alliance sacrée des vieilles droite et gauche, unies dans leur volonté de se maintenir en place à tout prix et de poursuivre les mêmes politiques d'austérité, de soumission à Bruxelles, d'immigration massive et de laxisme", a ajouté la présidente du Front national.

Jean-Luc Mélenchon a appelé à ne pas donner "tous les pouvoirs" à Emmanuel Macron, en votant pour La France insoumise les 11 et 18 juin.

PORTRAIT Edouard Philippe, chaînon manquant et caution de droite

RÉACTIONS à la nomination d'Edouard Philippe

Philippe veut "tenter ce qui n'a jamais été tenté" - Reuters News (Avec Elizabeth Pineau, Sophie Louet et Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)