GENEVE, 7 novembre (Reuters) - Une organisation humanitaire spécialisée dans les soins médicaux a indiqué mercredi que l'armée syrienne s'emparait de l'aide humanitaire étrangère pour la revendre ou l'acheminer auprès des forces loyales au gouvernement, mettant des millions de vies en danger.

"Lorsque le régime attaque l'une de nos installations médicales, que ce soit un hôpital ou autre chose, ils emportent tout ce qu'ils peuvent et ils brûlent le reste", explique Tawfik Chamaa, médecin basé à Genève et porte-parole de l'Union des organisations syriennes de secours médicaux (UOSSM).

"Ils prennent tout ce qu'ils peuvent et cela dépend seulement du nombre de soldats qu'ils ont, mais la plupart du temps, ils revendent cela au marché noir", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à Genève.

Selon lui, l'aide dérobée, de même que d'autres produits comme les appareils électriques pillés dans les maisons abandonnées, sont vendus au marché noir dans les villes relativement calmes de Syrie.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Programme alimentaire mondial (Pam) des Nations unies, deux organismes d'aide internationaux présents en Syrie, ont précisé que les deux accusations spécifiques formulées par Tawfik Chamaa à propos du détournement de l'aide étrangère d'une autre organisation n'étaient pas confirmées.

Le CICR a néanmoins ajouté qu'il traitait ces accusations "très au sérieux" et qu'il enquêterait auprès de l'UOSSM et des autorités syriennes.

Fondée à Paris en janvier, l'UOSSM est un collectif d'une quinzaine d'organisations d'aide humanitaire et de secours médical et de centaines de médecins syriens ou d'origine syrienne.

Forte d'un budget de 3 millions d'euros, elle compte trente hôpitaux de campagne en Syrie et projette d'en créer trente autres ainsi que de travailler avec des dispensaires locaux et des professionnels de la santé. Elle doit souvent agir dans le secret pour ne pas être visée, précise son porte-parole.

Les hôpitaux publics syriens ne prennent en charge que les partisans du président Bachar al Assad, laissant les autres se débrouiller seuls, affirme cette source.

"Nous installons donc ces lieux de premiers secours, ces hôpitaux clandestins à nos risques et périls, afin de survenir aux besoins du reste DRU FOD (de la population), les civils qui ont été bombardés, les femmes et les enfants, les gens qui ne peuvent pas aller dans les hôpitaux publics pour quelque raison que ce soit, sachant qu'une personne blessée qui se rend dans un hôpital public risque d'être arrêtée ou exécutée parce qu'elle sera considérée comme un ennemi", ajoute le médecin.

(Tom Miles, Juliette Rabat pour le service français)