Selon un rapport publié à la veille des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale, les pays émergents paieront un montant record de 400 milliards de dollars pour le service de leur dette extérieure cette année, et 47 d'entre eux ne pourront pas dépenser l'argent dont ils ont besoin pour l'adaptation au climat et le développement durable sans risquer de se retrouver en situation de défaut de paiement dans les cinq prochaines années.

Le rapport du Projet d'allègement de la dette pour une relance verte et inclusive (DRGR) a constaté que les 47 pays en développement atteindraient les seuils d'insolvabilité de la dette extérieure, tels que définis par le Fonds monétaire international (FMI), au cours des cinq prochaines années s'ils investissaient les montants nécessaires pour atteindre les objectifs de l'Agenda 2030 et de l'Accord de Paris.

"Ils seraient dans une situation de surendettement telle qu'ils frapperaient à la porte du (défaut de paiement), compte tenu de l'environnement actuel de la dette, s'ils devaient essayer de mobiliser ce type de financement", a déclaré Kevin Gallagher, directeur du Global Development Policy Center de l'Université de Boston, qui a dirigé le projet.

La plupart des pays à risque se trouvent en Afrique, notamment le Sénégal, le Nigeria et le Kenya.

Dix-neuf autres pays en développement n'ont pas les liquidités nécessaires pour atteindre les objectifs de dépenses sans aide, bien qu'ils ne s'approchent pas des seuils de défaillance.

Le rapport appelle à une refonte de l'architecture financière mondiale, à l'annulation de la dette des pays les plus menacés et à une augmentation des financements abordables et des rehaussements de crédit.

"Nous devons mobiliser davantage de capitaux et réduire le coût du capital pour les pays si nous voulons avoir la moindre chance d'atteindre nos objectifs", a déclaré M. Gallagher à l'agence Reuters.

Le projet DRGR est le fruit d'une collaboration entre le Global Development Policy Center de l'université de Boston, la fondation allemande Heinrich-Böll et le Centre for Sustainable Finance de la School of Oriental and African Studies (SOAS) de l'université de Londres.

Le rapport presse également le Fonds monétaire international de revoir la manière dont il calcule la viabilité de la dette : des évaluations à la consonance obscure qui sont cruciales pour déterminer le montant de l'allègement de la dette dont bénéficient les pays en défaut de paiement.

Si le montant de la dette que le FMI détermine qu'un pays peut supporter est trop élevé, ce dernier sera confronté à des paiements inabordables qui pourraient le ramener en situation de défaut de paiement.

Toutefois, les créanciers privés ont parfois critiqué les analyses du Fonds, les jugeant trop pessimistes, ce qui fait qu'elles sont surveillées de près et qu'elles suscitent des tensions politiques.

Selon le DRGR, le FMI, qui procède actuellement à une révision de ses analyses sur plusieurs années, doit intégrer les besoins en matière de dépenses liées au climat, ainsi que les réserves destinées à couvrir les chocs allant des catastrophes climatiques aux crises économiques en passant par les pandémies.

"Si la communauté internationale n'agit pas de manière rapide et uniforme pour fournir un allègement complet de la dette là où c'est nécessaire, ainsi que de nouvelles liquidités, des subventions et un financement concessionnel du développement, le coût de l'inaction sera exorbitant", prévient le rapport.