par Pascale Denis

Le projet de loi sur la réforme des retraites doit être présenté la semaine prochaine à l'Assemblée nationale, mais Eric Woerth a déclaré mercredi devant les députés qu'un recours aux réserves du Fonds était envisageable dès à présent, compte tenu de l'ampleur des déficits accumulés.

Le FRR, doté de 34,5 milliards d'euros d'actifs, est censé couvrir, à partir de 2020, une partie des besoins de financement des régimes de retraite du secteur privé.

"Nous attendons les orientations explicites du gouvernement. Nous verrons ensuite s'il y a des conséquences sur notre politique de gestion financière", a déclaré à la presse jeudi Raoul Briet, président du conseil de surveillance du FRR, en marge d'une conférence consacrée au bilan financier de l'exercice 2009.

Interrogé sur les éventuels obstacles à des décaissements anticipés, il a répondu qu'il n'existait pas d'impossibilité juridique de mettre fin à tel ou tel mandat de gestion existant, mais qu'il était difficile de désinvestir brutalement d'importants montants et que la question du "timing" était très importante.

"Il vaut mieux pouvoir choisir son moment plutôt que d'être tenu de le faire toutes affaires cessantes, surtout dans des périodes de marché difficiles", a-t-il dit.

Raoul Briet a également évoqué la difficulté de sortir d'actifs non cotés, donc peu liquides.

DETTE SOUVERAINE ET VALEURS FINANCIÈRES

A la fin mars 2010, le FRR était investi à 46,8% en actions, 27% en obligations à taux fixes, 8,2% en obligations indexées sur l'inflation, 9,8% en fonds monétaires, 3,2% en immobilier et 5% en matières premières.

Les responsables du fonds ont également indiqué, en réponse à une question, que l'exposition du FRR à la dette souveraine espagnole était de 520 millions d'euros, de 200 millions pour la dette grecque, de 200 millions également pour la dette irlandaise, de 1.650 millions pour la dette italienne et de 95 millions pour la dette portugaise.

La dette française compte quant à elle pour environ 3,5 milliards du total des actifs.

Antoine de Salins, membre du directoire, a cependant souligné que l'essentiel des risques financiers venait du portefeuille investi en actions et qu'un choc obligataire majeur, qui verrait par exemple les taux grimper de 300 points de base, "dégraderait de seulement 2% les actifs".

Le secteur financier au sens large, le plus exposé à la crise de la dette souveraine, représente ainsi 25% du portefeuille actions du Fonds.

"C'est un vrai sujet de préoccupation", a reconnu Antoine de Salins.

Après la publication de l'arrêté sur la liste française des paradis fiscaux, en février, le FRR est sorti du capital de deux sociétés de croisières de luxe et d'une compagnie d'ingénierie technique ayant leur siège social au Liberia et au Panama.

ACTIONS BP

Investi en actions British Petroleum, le FFR a indiqué qu'il examinerait ses positions si la politique de la compagnie pétrolière en matière de sécurité n'était pas "significativement rehaussée".

Les recettes du FRR proviennent essentiellement de la fraction (2%) des cotisations sociales perçues sur les revenus du patrimoine et des placements (soit environ 1,5 milliard d'euros par an).

La performance de gestion de ses actifs est ressortie à 2,6% au premier trimestre 2010, pour une performance annualisée à 3,1% depuis juin 2004, date de l'activation de ses mandats de gestion.

Avec une espérance de rendement brut de 6,3% par an, il estime qu'il devrait disposer d'ici à 2020 de 87 milliards d'euros (courants). Selon les prévisions du Conseil d'orientation des retraites (COR), le déficit de la seule Cnav (Caisse nationale d'assurance vieillesse), à laquelle souscrivent la quasi-totalité des salariés du secteur privé, devraient totaliser 94,3 milliards d'euros entre 2020 et 2040.

Edité par Jean-Michel Bélot