STRASBOURG, 22 janvier (Reuters) - Le Conseil de l’Europe cherche une issue à la crise dans laquelle l'institution est plongée depuis la suspension par la Russie de sa contribution financière, en représaille aux sanctions décidées après l’annexion de la Crimée.

Prononcée en avril 2014 et partiellement reconduite pour un an en janvier 2015, la suspension des droits de vote des élus russes au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a conduit la délégation russe à refuser de siéger jusqu’à nouvel ordre à Strasbourg.

Pour tenter de débloquer la situation, l’Assemblée du Conseil de l’Europe a approuvé lundi la création d’une commission chargée de réfléchir à "son rôle et à sa mission" et notamment aux règles relatives à "la représentation des Etats", soit implicitement au régime des sanctions.

Deux parlementaires de Russie unie, le parti du président Poutine, Piotr Tolstoï pour la Douma, la chambre basse, et Constantin Kovatchev pour le Conseil de la Fédération, participeront mardi, comme invités, à la première réunion à huis clos de cette commission.

L’abandon de la possibilité de sanctionner une délégation pour des motifs politiques fait partie des exigences formulées dès 2016 par la Russie.

Le secrétaire général du Conseil de l’Europe, Thorbjorn Jagland, a invité les parlementaires à avancer dans cette voie, lundi, et à laisser à d’autres organisations, comme l’Onu et l’OSCE, le soin de régler les conflits. "Je voudrais comparer notre rôle avec celui de la Croix Rouge (…) qui doit éviter d’être entraînée dans les conflits", a-t-il affirmé en définissant le Conseil de l’Europe comme principalement défenseur des droits de l’homme individuels.

Les véritables menaces pour l’organisation sont actuellement, selon l’ancien Premier ministre norvégien, "la tendance croissante à remettre en cause l’autorité de la Cour européenne des droits de l’homme", son bras armé, et la baisse des contributions budgétaires de certains Etats membres.

L’arrêt de la contribution budgétaire de la Russie, l’un des cinq grands "payeurs" de l’organisation, représente 33 millions d’euros, 10% du budget annuel. La marche arrière de la Turquie, qui venait, à sa demande, de devenir grand payeur, entraîne une perte supplémentaire de 15 millions d’euros.

Thorbjorn Jagland a listé la peine de mort, la torture, l’esclavage et les condamnations arbitraires comme seuls droits de l’homme susceptibles d’entraîner la suspension d’un Etat.

La réforme du règlement de l’Assemblée ne devrait pas être simple pour autant. Des parlementaires de plusieurs pays d’Europe orientale, dont l’Ukraine et la Pologne, ont déjà dit qu’ils s’opposeraient à tout compromis avec les Russes.

"Si nous pouvons avoir un vrai dialogue avec les Russes, c’est très bien, mais si c’est une façon de céder à leur chantage, ce sera une très mauvaise chose", a estimé, au nom du groupe Libéral-démocrate, le Danois Michael Aastrup Jensen. (Gilbert Reilhac, édité par Yves Clarisse)