TRIPOLI (Reuters) - Le Premier ministre italien Giorgia Meloni s'est envolé samedi pour Tripoli où elle devrait signer un important accord gazier visant à accroître les approvisionnements énergétiques de l'Europe malgré l'insécurité et le chaos politique qui règnent dans ce pays d'Afrique du Nord.

Mme Meloni rencontre à Tripoli Mohamed al-Menfi, chef de la présidence tripartite de la Libye, et le Premier ministre Abdulhamid al-Dbeibah, chef du gouvernement d'union nationale (GUN) reconnu par la communauté internationale.

Selon les déclarations publiques faites cette semaine par Farhat Bengdara, chef de la National Oil Corp (NOC) de Libye, l'accord portera sur un montant de 8 milliards de dollars pour produire jusqu'à 850 millions de pieds cubes par jour de gaz offshore en provenance de la Méditerranée.

Toutefois, le parlement libyen et les principales factions armées rejettent la légitimité du gouvernement de M. Dbeibah, ce qui fait craindre une nouvelle flambée de conflit après plus de deux ans de paix relative.

En raison de la guerre en Ukraine, les pays européens ont de plus en plus cherché à remplacer le gaz russe par des approvisionnements énergétiques en provenance d'Afrique du Nord et d'ailleurs au cours de l'année écoulée.

L'Italie a déjà pris l'initiative de s'approvisionner en gaz algérien, en établissant un nouveau partenariat stratégique qui comprend des investissements pour aider l'entreprise énergétique nationale Sonatrach à inverser des années de baisse de production.

Tout accord conclu à Tripoli pourrait être compromis par le conflit interne en Libye, qui a divisé le pays entre des factions rivales qui se disputent le contrôle du gouvernement et contestent leurs revendications respectives de légitimité politique.

Soulignant les divisions politiques en Libye, le ministre du pétrole de Dbeibah, Mohamed Oun, a rejeté tout accord entre la NOC et l'Italie, déclarant dans une vidéo sur le site web du ministère que de tels accords devraient être conclus par le ministère.

Le chef de la NOC, M. Bengdara, a été nommé l'année dernière par M. Dbeibah, dont le gouvernement intérimaire a été mis en place en 2021 dans le cadre d'un processus soutenu par l'ONU.

Le parlement basé dans l'est du pays et les factions qui le soutiennent ont déclaré au début de l'année dernière que le gouvernement n'était plus légitime, rejetant à la fois la nomination de M. Bengdara et les accords que Tripoli a conclus avec des États étrangers.

Le chaos qui règne en Libye depuis le soulèvement de 2011 soutenu par l'OTAN qui a chassé l'autocrate Mouammar Kadhafi a laissé une grande partie du pays aux mains de factions armées. Une petite mission militaire italienne est déployée en Libye depuis plusieurs années.

L'insécurité et l'anarchie ont fait de la Libye un itinéraire majeur, mais dangereux, pour les migrants qui cherchent à rejoindre l'Europe, souvent via l'île italienne de Lampedusa. Des centaines de migrants meurent chaque année en tentant de faire ce voyage.

Mme Meloni a fait de la lutte contre l'immigration clandestine un élément majeur de son programme de gouvernement et a insisté sur ce point lors de ses récentes visites en Algérie et en Égypte. Le ministre italien de l'intérieur, Matteo Piantedosi, qui supervise une grande partie de la question de l'immigration pour Rome, s'est rendu en Libye avec Mme Meloni.