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(Easybourse.com) Les marchés émergents semblent avoir retrouvé le chemin radieux des performances…
Les marchés émergents ont rattrapé le retard pris depuis le début de la crise par rapport aux marchés développés. L'indice MSCI Emerging Markets avait affiché une performance de -50,9% en 2008 et de 72.9% en 2009. La performance est de 15.8% depuis janvier. La performance de la Chine est de 13.9%.
Il y a une meilleure compréhension des investisseurs par rapport à cette classe d'actifs et a une connaissance plus riche et plus étendue de celle-ci par rapport aux débuts des années 2000.

Les fondamentaux sont sains…
Les Etats-Unis sont historiquement un gros contributeur à la croissance du PIB mondial, mais la Chine pourrait prendre progressivement le relais. Les Etats-Unis représentent encore 20% du PIB mondial alors que la Chine en représente 13%. Cependant le premier pays affichera une croissance de 3,4% et le second devrait enregistrer une progression de 10%, ce qui a pour conséquence une contribution américaine à la croissance marginale du PIB mondial de 0,7% et une contribution chinoise de 1,3%.

Hier le FMI relevait dans un communiqué le risque de surchauffe des économies émergentes. Qu'en pensez-vous ?
Il y a lieu de prendre du recul par rapport à ce risque, qui n'est pas nouveau. Avant que ne commence la révolution industrielle en Europe puis aux Etats Unis, l'Inde et la Chine avaient un poids deux fois plus élevé qu'aujourd'hui dans le PIB mondial.
Par ailleurs, il y a autant de risque de surchauffe sur les marchés émergents que sur les marchés développés. La surchauffe devrait épargner seulement les pays qui payent aujourd'hui le prix fort d'un accroissement débridé du crédit et des dépenses publiques.
Ceci étant, le supercycle économique qui se dessine dans les grands pays émergents devrait se poursuivre en dépit de probables corrections passagères, à moins d'une erreur d'exécution des autorités, ce qui ne s'inscrit pas dans notre scénario central.

L'abondance des crédits distribués en Chine ne vous inquiète-t-elle pas ?
Le moindre propos des autorités de Pékin peut susciter des banques l'octroi de prêts massifs. Mais nous pensons  que les autorités chinoises sauront, à l'instar du passé, réagir à temps et de manière à freiner les exagérations constatées.

Le souci principal de la Chine est d'éviter tout trouble social en élevant le pouvoir d'achat des ménages, notamment en milieu rural. L'industrialisation du pays aide à cela. C'est en partie ce qui a expliqué le boom du marché immobilier et des dépenses en infrastructures qui ont occasionné une forte remontée des prix des matières premières.
Pour autant, ayant remarqué que leur économie était très dépendante des exportations et trop exposée à des risques exogènes, la volonté affichée a été d'avoir une croissance plus équilibrée entre exportations et consommation domestique. A terme l'économie chinoise pourrait davantage ressembler à l'économie brésilienne.
 
De quelle manière appréhendez-vous le niveau de valorisation des marchés émergents ?
Le prix sur bénéfices nets anticipés sur un an est inférieur à 12. Par rapport à leur propre histoire, les marchés émergents ne sont pas excessivement chers. Fin 2008, le prix était à moins de 7, mais il avait auparavant atteint un pic à 15 en 2007.
Sur la base des bénéfices réalisés, les Etats-Unis se traitent à 12,4 fois les bénéfices, les pays développés ex US se traitent à 11,6 fois, et  les marchés émergents se traitent à 10,5. La décote est, ce faisant, d'environ 13%.

La thématique n'est pas surjouée. Les marchés émergents représentent 15% de la capitalisation mondiale et pèsent moins de 5% dans les portefeuilles d'investissement, que ce soit des investisseurs particuliers ou institutionnels.  Les opportunités d'investissement sont nombreuses dans un contexte plus sain, en particulier du fait que la dette publique des pays émergents est deux fois moindre que celle des pays développés et qu'ils disposent des trois quarts des réserves de changes.

Il est toujours possible de rentrer dans de meilleures conditions sur ces marchés mais on ne peut pas se permettre d'être éternellement sous pondérés sur cette classe d'actifs.

Il ne faut pas confondre croissance économique et performance boursière…
Statistiquement les marchés actions ont tendance à surperformer en début de cycle économique. Une fois que la croissance du PIB culmine, les marchés actions ne font généralement plus grand-chose.

Parmi les risques qui menacent ces marchés, nous trouvons le risque géopolitique…
La liste n'est pas exhaustive, mais nous pouvons citer les relations entre la Corée du Nord et la Corée du Sud, la santé vacillante du roi et les luttes de succession en Thaïlande, les élections dans un certain nombre de pays d'Europe de l'Est, d'Europe Centrale ou d'Amérique Latine, avec d'éventuelles dérives populistes…

Que penser de la crise des dettes souveraines en Europe ?
La crise des dettes souveraines dans la zone euro pourrait constituer une aubaine pour les marchés émergents. Une sur réaction des investisseurs pourrait provoquer une chute brusque et non fondée des indices émergents et une opportunité pour augmenter l'exposition sur ces marchés…

Face aux risques existants, la solution serait-elle alors d'être réactifs, dynamiques sur ces marchés ?
Les investisseurs internationaux doivent surmonter de nombreux obstacles sur les marchés émergents. Ils pâtissent aussi d'une moindre liquidité par rapport aux marchés développés, si bien que vous ne pouvez pas vous offrir le luxe de faire des violents mouvements sur cette classe d'actifs.
Nous même qui avons la possibilité de faire des transactions en quasi-continu, préférons éviter d'agir pendant des périodes très courtes de panique et regarder les fondamentaux pour faire des paris de long terme, avec une durée moyenne de détention d'un titre d'environ deux ans.
Cela nous permet de limiter le turnover et par conséquent les coûts qui peuvent avoir une incidence négative significative sur la valeur ajoutée dans cette classe d'actifs. 
Il faut donc garder la tête froide.

Quels sont vos principaux paris positifs et vos principaux paris négatifs ?
Nous sommes sous pondérés sur le marché chinois. Nous préférons être exposés à la croissance chinoise en achetant les secteurs et les pays bénéficiaires de l'expansion économique du pays. Nous sommes également sous pondérés sur le Brésil.
Nous avons longtemps été négatifs sur l'Inde en particulier du fait de la cherté du marché, à présent cette sous pondération est moins prononcée.
Nous sommes largement surpondérés sur l'Europe Centrale et l'Europe de l'Est, Russie et Turquie pour l'essentiel, en raison des niveaux de valorisation et de la configuration technique de ces marchés. Nous avons également de légères surpondérations sur la Hongrie et la République Tchèque.

Y a-t-il des pays à éviter ?
Pas vraiment. Même si des inquiétudes pèsent sur certains pays, comme l'inflation qui devrait entrainer un relèvement des taux et alourdir la capacité des entreprises à lever des capitaux, nous ne sommes à l'écart d'aucun grand pays émergent. 

Propos recueillis par Imen Hazgui

 

- 23 Juin 2010 - Copyright © 2006 www.easybourse.com

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