* Premier attentat majeur dans le delta du Nil

* Des unités de police déployées dans le pays

* Les Frères musulmans condamnent l'attentat suicide

* Violences en soirée à Mansoura (Bilan actualisé, précisions, nouveaux incidents à Mansoura)

par Yasmine Saleh et Shadia Nasralla

LE CAIRE, 24 décembre (Reuters) - Un attentat à la voiture piégée a fait 15 morts, dont au moins 12 policiers, en Basse-Egypte mardi devant un complexe des forces de l'ordre, à Mansoura, dans le delta du Nil.

On dénombre aussi, selon les services de sécurité, environ 140 blessés dans cette attaque suicide menée en tout début de journée par un kamikaze, selon le ministère de l'Intérieur qui se fonde sur les premiers éléments de l'enquête.

Il s'agit d'un des attentats les plus meurtriers dans le pays depuis la destitution par l'armée du président islamiste élu Mohamed Morsi le 3 juillet.

Le gouvernement intérimaire mis en place par l'armée a juré de continuer à combattre "le terrorisme noir. L'explosion, a-t-il précisé, s'est produite vers 01h00 du matin.

"Nous sommes confrontés à un ennemi qui n'a ni religion ni nation", a déclaré sur place le ministre de l'Intérieur, Mohamed Ibrahim, qui a lui-même survécu en septembre à un attentat à la voiture piégée au Caire.

"Ce type d'opération ne fait que renforcer la détermination de l'Etat à éradiquer le terrorisme dans tout le pays", a dit la présidence égyptienne. Des "unités de combat" de la police vont être déployées dans le pays avec pour ordre d'utiliser des balles réelles, a rapporté la télévision nationale.

Le gouvernement a, dans un premier temps, pointé du doigt les Frères musulmans en qualifiant la confrérie d'"organisation terroriste". Mais le communiqué officiel n'accuse pas explicitement les Frères d'être responsables de l'attentat.

Les Frères musulmans ont, de leur côté, condamné l'attaque et présenté leurs condoléances aux familles des victimes.

"Les Frères musulmans condamnent dans les termes les plus vifs l'attentat contre le QG de la police à Mansoura", a dit la confrérie dans un communiqué publié par son bureau de Londres.

"Les Frères musulmans considèrent qu'il s'agit d'une attaque directe contre l'unité du peuple égyptien et exige une enquête rapide afin de traduire en justice ceux qui ont perpétré ce crime", ajoute-t-elle.

BUS ET MAGASINS INCENDIÉS

Mardi soir à Mansoura, des centaines de personnes en colère ont pris d'assaut et incendié des bâtiments et des magasins censés appartenir à des Frères musulmans, ont rapporté des témoins et des médias officiels.

D'autres ont attaqué et incendié un bus vide après avoir aperçu l'un des passagers faire le signe de la main en l'air symbolisant la mort de centaines de partisans de Morsi lors du démantèlement en août d'un camp par la police au Caire.

Cet attentat accroît les risques de voir la violence endémique qui sévit dans le Sinaï se propager au delta du Nil, qui n'avait jusqu'à présent pas connu d'attaque de cette ampleur.

La télévision d'Etat a montré le bâtiment atteint par l'explosion, avec ses vitres éclatées et un pan de mur effondré. Des témoins ont raconté que de nombreux véhicules avaient brûlé à l'intérieur et à l'extérieur du complexe. La chaîne Nile News a interrompu ses programmes et appelé les habitants à se rendre à l'hôpital pour faire don de leur sang.

L'Egypte est le théâtre de violences politiques quasi quotidiennes depuis le 3 juillet. Plus de 1.500 personnes ont été tuées depuis cette date, en grande majorité des manifestants proMorsi, mais aussi quelque 200 soldats et policiers victimes d'attaques et d'attentats, en particulier dans le Sinaï où des groupes djihadistes sont actifs depuis une dizaine d'années.

Les autorités et les médias officiels accusent les Frères musulmans d'être derrière cette vague de violence, ce que ces derniers démentent.

La semaine dernière, la justice égyptienne a inculpé Mohamed Morsi et d'autres dirigeants de la confrérie pour une présumée "conspiration" avec le Hamas palestinien et le Hezbollah libanais en vue de commettre des "actes terroristes" en Egypte à l'époque où Hosni Moubarak était encore au pouvoir. (Avec Ali Abdelatti, Tangi Salaün, Pascal Liétout et Jean-Loup Fiévet pour le service français, édité par Gilles Trequesser)