par Zhou Xin et Simon Rabinovitch

C'est la première fois que la banque centrale modifie ce ratio de réserves depuis la baisse décidée en décembre 2008, dans le cadre à l'époque d'un cycle d'assouplissement des conditions du crédit face à la crise économique mondiale.

De nombreux observateurs s'attendaient à ce que Pékin relève ce seuil avant de s'engager dans une phase de hausse des taux d'intérêt mais la décision est intervenue plus tôt que prévu.

Il semble que les autorités chinoises craignent une arrivée trop forte de liquidités dans l'économie en raison d'un bond de l'activité bancaire avec la reprise, ce qui pourrait déboucher sur une surchauffe et une forte hausse de l'inflation.

L'annonce a fait reculer les marchés boursiers et les devises liées aux matières premières comme les dollars australien et canadien car elle alimente les craintes d'un ralentissement de la croissance de l'économie chinoise, principal moteur de la reprise mondiale ces derniers mois.

"Cela a pris les marchés par surprise, estime Lin Songli, économiste chez Guosen Securities à Pékin. "Cette décision vise avant tout à réduire les prêts bancaires."

Le relèvement d'un demi-point du ratio des réserves obligatoires entrera en vigueur le 18 janvier et s'appliquera à l'ensemble des établissements bancaires à l'exception des coopératives rurales de crédit, a précisé la Banque populaire de Chine sur son site internet (www.pbc.gov.cn).

Pour Shi Lei, analyste de Bank of China à Pékin, le ratio des réserves pourrait encore être relevé à deux ou trois reprises d'ici la fin du mois de juin.

"Le relèvement du ratio de réserves constitue un signal fort du fait que la banque centrale intensifie ses efforts pour absorber l'excédent de liquidités", affirme Shi Lei.

"Le relèvement pourrait retirer environ 200 à 300 milliards de yuans (20 à 30 milliards d'euros environ) du marché mais il faut en réalité retirer environ 700 à 800 milliards de yuans."

ÉPONGER LES EXCÉDENTS

La Chine utilise depuis longtemps le niveau des réserves bancaires pour éponger les liquidités excédentaires dans l'économie engendré par son énorme excédent commercial et des flux d'investissements spéculatifs.

C'est une arme importante dans son arsenal pour réduire l'inflation que les analystes s'attendent à voir monter à plus de 3% cette année après la déflation enregistrée pendant l'essentiel de l'année écoulée.

Le relèvement du ratio de réserves obligatoires intervient après deux mesures plus marginales de resserrement adoptées mardi par la banque centrale.

Elle a relevé le coupon de son adjudication à un an, d'un montant de 20 milliards de yuans, d'environ huit points de base, pour le porter à 1,8434%, alors qu'elle l'avait laissé inchangé lors des 20 précédentes opérations similaires. Le marché anticipait un relèvement de quatre points de base seulement.

La banque centrale a parallèlement retiré un montant record de 200 milliards de yuans de liquidités dans le cadre d'une opération de rachat de titres à 28 jours.

"C'est toujours pareil avec la politique chinoise: ils parlent de réglage fin mais cela ne se passe jamais de cette manière. A chaque fois, c'est soit rien, soit le boom", a commenté Ken Peng, analyste de Citigroup à Pékin.

"Quand ils parviennent à un consensus, les choses se font très vite."

Ces décisions interviennent après la publication d'articles de presse selon lesquels le crédit bancaire a bondi au cours de la première semaine de l'année pour atteindre 600 milliards de yuans.

Ce chiffre s'est ajouté aux inquiétudes déjà vives suscitées par les statistiques du commerce extérieur chinois en décembre, alimentant les craintes d'une surchauffe de la troisième économie mondiale.

Un responsable de la banque centrale chinoise a cherché à minimiser la décision sur les réserves bancaires en disant qu'elle était destinée à gérer la liquidité et à assurer une stabilité des prêts bancaires.

"Notre politique monétaire reste raisonnablement accommodante", a déclaré ce responsable en soulignant qu'il s'agissait de procéder à des réglages fins.

Version française Marc Angrand et Danielle Rouquié