Après leur plongeon de 7% la veille, les Bourses chinoises ont encore perdu plus de 2% dans les premiers échanges, faisant craindre une deuxième séance de suite de ventes massives qui avait déclenché lundi l'activation des tout nouveaux "coupe-circuits" mis en place après le krach de l'été et provoqué l'arrêt des transactions une heure et demie environ avant la clôture officielle.

Mais la banque centrale et la commission de régulation du marché boursier (CSRC) sont rapidement intervenues mardi, permettant aux indices de remonter dans des échanges volatils.

La Banque populaire de Chine (BPC) a injecté près de 20 milliards de dollars (18,6 milliards euros) dans le marché monétaire, sa plus importante injection de liquidités depuis septembre, et des cambistes pensent qu'elle a dans le même temps fait appel à des banques publiques pour soutenir le yuan.

Le régulateur du marché boursier a de son côté fait savoir qu'il envisageait des restrictions supplémentaires sur des ventes de titres par de gros actionnaires.

L'indice CSI300 des principales valeurs cotées à Shanghai et Shenzhen a clôturé en hausse de 0,28% à 3.478,78 points mais le composite de Shanghai a cédé 0,26% à 3.287,71. Lundi, ils avaient chuté respectivement de 6,85% et 6,98%.

La détermination des autorités chinoises à stabiliser leur marché boursier, notoirement volatil et spéculatif, n'est pas sans risque. Selon certains professionnels, les interventions du gouvernement ont maintenu des valorisations aujourd'hui trop élevées au vu du ralentissement de la croissance et de la baisse des profits des entreprises.

Elles ont en outre réduit les volumes d'échange, rendant le marché plus vulnérable à des fluctuations brutales, et fait fuir les investisseurs étrangers qui forment pourtant un actionnariat plus stable que la masse des petits porteurs chinois.

LE YUAN POURSUIT SA GLISSADE

"On attend depuis longtemps une correction de cette ampleur", dit Samuel Chien, du fonds spéculatif BoomTrend Investment Management à Shanghai. "L'économie ne va pas bien, les valorisations boursières restent élevées et le yuan continue de flancher, témoignant d'une accélération des sorties de capitaux. Le marché doit s'adapter."

Bon nombre de traders jugent inévitable que Pékin laisse encore filer le yuan pour soutenir ses exportations.

Les autorités ont laissé la monnaie se déprécier de 4,7% contre le dollar l'an dernier, du jamais vu, et la devise a inscrit lundi de nouveaux plus bas de quatre ans et demi, contribuant au plongeon des marchés boursiers.

Les interventions de la banque centrale ont permis de stabiliser le marché intérieur du yuan mais le yuan "offshore" a poursuivi sa glissade pour s'échanger à 6,6373 pour un dollar, soit une décote de 1,7% par rapport au yuan "onshore" qui risque d'encourager des politiques d'arbitrage de la part des entreprises et des intervenants financiers.

Si le répit de mardi ne se révèle que provisoire, les autorités de marché pourraient devoir de nouveau geler les introductions en Bourse, prolonger l'interdiction de certains types de ventes ou continuer de soutenir les indices en ordonnant à des courtiers ou des sociétés de gestion d'acheter ou de conserver des valeurs, même à perte.

Autant de mesures qui auraient pour effet de différer encore une réforme en profondeur du marché boursier que les investisseurs étrangers appellent de leurs voeux, qui inclurait par exemple l'adoption d'un nouveau système d'enregistrement plus transparent pour les introductions en Bourse, à l'image de ce qui se fait à Wall Street.

(avec la contribution de Samuel Chen; Benoît Van Overstraeten et Véronique Tison pour le service français, édité par Marc Angrand)

par Pete Sweeney