La deuxième plus grande caisse de retraite du Canada envisage de refuser le soutien de certains administrateurs de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada lors d'une prochaine assemblée annuelle au sujet de la représentation francophone au sein du conseil d'administration de la société, a déclaré une source familière avec la question.

La Caisse de dépôt et placement du Québec étudie la possibilité d'un vote de protestation, après avoir dénoncé une décision antérieure prise en avril par le plus grand opérateur ferroviaire du Canada, qui aurait laissé son conseil d'administration sans aucun administrateur local de langue maternelle française.

La Caisse, dont le siège social est à Montréal et qui est le dixième actionnaire en importance du CN, a refusé de divulguer ses intentions de vote avant l'assemblée générale annuelle du chemin de fer, qui aura lieu le 20 mai.

Le CN s'est refusé à tout commentaire. La source a refusé d'être identifiée, car les discussions sont confidentielles.

À la fin du mois d'avril, après que des préoccupations aient été soulevées au sujet de la langue, le conseil d'administration du CN a déclaré qu'il nommerait un administrateur francophone et québécois "dans les prochains mois", pour remplacer l'ancien premier ministre provincial Jean Charest, qui est bilingue.

La Caisse avait également mentionné en privé une représentation au conseil à l'actionnaire TCI Fund Management Ltd, qui possède un peu plus de 5 % des actions du CN, selon les données d'Eikon Refinitiv. TCI a refusé de commenter. Tout vote de protestation de la Caisse à l'encontre de certains administrateurs, bien que probablement symbolique, survient alors que l'activisme des investisseurs sur des questions allant du changement climatique à la justice sociale se développe, l'année 2021 étant considérée comme une année record.

La Caisse, qui avait 420 milliards de dollars canadiens (322,4 milliards de dollars) d'actifs sous gestion à la fin de 2021, est le 10e actionnaire en importance du CN et gère des fonds au profit de six millions de Québécois. Elle évite généralement de s'exprimer sur les actions qu'elle détient.

Mais la Caisse s'est exprimée publiquement sur la composition du conseil d'administration, après le départ de M. Charest et la nomination de trois nouveaux administrateurs anglophones de l'extérieur du Québec.

La Caisse, qui détient une participation d'environ 1,69 % dans le CN selon les données de Refinitiv, a qualifié d'"inacceptable" le manque de représentation francophone au sein du conseil d'administration, un commentaire repris cette semaine par le ministre des Transports du pays.

Le CN, dont le siège social est à Montréal, compte Cascade Investment comme son principal actionnaire. Cascade, qui gère des actifs exclusivement pour le compte de Bill & Melinda Gates Investments, n'était pas immédiatement disponible pour commenter.

La firme de procuration ISS a recommandé dans un récent rapport que les actionnaires du CN votent pour tous les administrateurs.

D'autres des 10 principaux actionnaires selon les données de Refinitiv, dont la société québécoise Jarislowsky Fraser, et le groupe Vanguard ont refusé de commenter.

Bien que la langue n'ait pas galvanisé les investisseurs comme le climat, elle demeure une question sensible dans le Québec majoritairement francophone, la deuxième province la plus peuplée du pays, où le mécontentement lié à la domination de l'anglais a contribué à la montée du Parti québécois (PQ) séparatiste dans les années 1970.

L'année dernière, le directeur général d'Air Canada, basé à Montréal, s'est excusé et s'est engagé à apprendre le français après avoir déclaré qu'il n'avait pas besoin de parler cette langue malgré les années passées dans la province. Hannah Shoesmith, spécialiste de la gouvernance d'entreprise pour EOS chez Federated Hermes, a déclaré que les barrières linguistiques ont déjà été citées par des conseils d'administration en Corée comme des raisons pour éviter de nommer des directeurs, bien qu'elle ait refusé de nommer les entreprises car les discussions étaient privées. (1 $ = 1,3026 dollar canadien) (Reportage d'Allison Lampert à Montréal et de Simon Jessop à Londres ; édition de Denny Thomas et Nick Zieminski)