Washington (awp/afp) - L'inflation a bondi parmi les principales préoccupations des chefs d'entreprise américains, selon une enquête publiée jeudi, tandis que la future numéro 2 de la banque centrale a confirmé que l'institution était en train de fourbir ses armes, prête à agir.

"Je suis très préoccupée par le niveau élevé de l'inflation", a souligné jeudi Lael Brainard, la future vice-présidente de la banque centrale américaine (Fed), lors d'une audition devant la commission bancaire du Sénat.

"Nous entendons des familles de travailleurs à travers le pays parler d'inflation (...). Nous avons un outil puissant et nous allons l'utiliser", a-t-elle assuré.

Face à des prix qui ont grimpé de 7% en 2021, leur plus forte hausse en près de 40 ans, la puissante Réserve fédérale est donc sur le pied de guerre.

Son arme: des taux directeurs, qu'elle s'apprête à relever plus tôt et plus fort que prévu, sans doute dès mars. L'objectif: renchérir le coût du crédit, et, par ricochet, faire reculer la consommation.

"Nous avons un outil qui agit sur la demande, qui est le taux directeur", a souligné la future numéro 2 de la Fed, qui, si sa nomination est confirmée par le Sénat, prendra ses fonctions en février.

Offre et demande

Mais l'exercice est délicat, car il faut éviter de frapper trop fort, ce qui pèserait sur l'emploi.

Mme Brainard s'est dite convaincue que les mesures que prendra la Fed "réduiront l'inflation tout en continuant à permettre au marché du travail de retrouver sa pleine vigueur au fil du temps. Nous allons donc retrouver le plein emploi tout en ramenant l'inflation à 2%".

L'inflation est aussi devenue une préoccupation majeure pour les dirigeants d'entreprises, qui s'inquiètent de la voir persister au-delà de 2022, selon une enquête publiée jeudi par le centre de recherche économique Conference Board.

Un marché du travail tendu, une demande qui reste forte et une trajectoire du Covid incertaine pourraient cependant contribuer à faire encore grimper les prix, a alerté jeudi Jason Furman, ancien conseiller économique du président Barack Obama et professeur à Harvard, dans une tribune publiée par le Wall Street Journal.

"Je m'attends à ce que l'inflation reste élevée cette année, peut-être même plus qu'en 2021", a-t-il alerté.

Mais les économistes restent divisés: "je continue à croire que (...) la poussée indésirable de l'inflation en 2021 (...) se montrera au final largement transitoire avec une politique monétaire appropriée", a ainsi commenté l'actuel vice-président de la Fed, Richard Clarida, dans un document de recherche publié jeudi.

"Bidenflation"

Si la banque centrale peut agir sur la demande des consommateurs, elle n'a en revanche pas de levier d'action sur l'autre origine de la hausse des prix: l'offre, c'est-à-dire les perturbations sur la chaîne mondiale d'approvisionnement.

Elles ne se sont pas résorbées comme le prévoyaient de nombreux analystes, et pourraient même être accrues par le variant Omicron.

Aux États-Unis, ce phénomène est renforcé par les pénuries de main d'oeuvre qui ralentissent la production et les livraisons, limitant encore plus l'offre.

En face, la demande est, elle, très forte, grâce aux aides financières du gouvernement face à la pandémie, mais aussi aux fortunes des propriétaires immobiliers et détenteurs de portefeuilles d'actions qui ont grossi, avec la hausse des prix de ces actifs.

Cette flambée du coût de la vie est une des nombreuses épines dans le pied de Joe Biden, et l'opposition républicaine ne manque pas de lui en attribuer les torts, surnommant désormais la hausse des prix, la "Bidenflation".

Pour agir sur l'offre, la Maison Blanche doit annoncer de nouvelles mesures afin de résorber l'engorgement dans les ports américains.

Une brève éclaircie est toutefois venue des prix de gros, qui ont, en décembre, augmenté de 0,2%, bien moins vite qu'au cours des mois précédents, selon l'indice PPI, une mesure de l'inflation côté fabricants et vendeurs, publié jeudi par le département du Travail.

afp/rp