par Barbara Lewis

Les réunions des pays producteurs organisées ce mois-ci, dans le cadre de l'Opep à Quito et entre pays arabes au Caire, n'ont pas laissé prévoir un relèvement des objectifs de production en vigueur depuis deux ans.

Un cours supérieur à 100 dollars ne serait pas négatif pour l'économie et n'entraînerait pas une hausse de la production de l'Opep s'il était dû à la spéculation et non à une offre insuffisante, ont indiqué plusieurs membres du cartel.

"Si le pétrole dépasse 100 dollars à cause de la spéculation, l'Opep ne fera rien", a assuré ce mois-ci le secrétaire général Abdoullah al Badri, tout en soulignant que l'organisation ne souhaitait pas un tel cours.

Le pétrole brut nord-américain a touché cette semaine un plus haut de 26 mois à 91,88 dollars.

LE FACTEUR MÉTÉO

Les analystes se divisent entre ceux qui voient un soutien durable au secteur du fait de la reprise économique mondiale, et ceux qui se concentrent sur les différences entre les conditions de marché actuelles et celles de 2008, lorsque le baril de brut avait atteint son plus haut historique à presque 150 dollars.

"Il reste à savoir si les prix actuels réagissent aux conditions climatiques de court terme ou bien aux problèmes monétaires et de demande à plus long terme", a commenté Sadad al Husseïni, analyste pétrolier et ancien responsable du monopole pétrolier saoudien, Saudi Aramco.

"Etant donné l'abondance des réserves de pétrole, il serait absurde de la part de l'Opep de réagir excessivement à ce qui n'est peut-être qu'une situation passagère."

Le pétrole supplémentaire mettrait en effet plusieurs semaines à arriver jusqu'aux consommateurs, et les conditions hivernales pourraient alors s'être adoucies.

Selon certains analystes, la prudence affichée par l'Opep rappelle l'attitude qui était la sienne avant la flambée record de 2008.

"La dernière réunion à Quito a donné l'impression que les producteurs se souciaient surtout d'une baisse. De notre point de vue, cela signifie qu'une hausse ne sera contrôlée qu'a posteriori, et non de façon préventive", a commenté Barclays Capital.

La branche d'investissement de la banque britannique prévoit pour 2011 un baril de brut américain à 91 dollars, et souligne que cette valeur moyenne implique "une période durable d'échanges au-dessus de 100 dollars au cours de l'année".

Le pétrole s'échange actuellement à un prix 35% plus élevé que son plus bas de l'année atteint en mai. Le plus haut de cette semaine dépasse de 15% le dernier cours de clôture de 2009.

LE PÉTROLE BIEN MOINS TOUCHÉ QUE LE CUIVRE

La tendance haussière actuelle a suivi la décision de la Réserve fédérale américaine de relancer de 600 milliards de dollars sa politique d'assouplissement quantitatif, déclenchant en réponse une vague d'achats dans les marchés financiers.

"En un sens, la Fed a poussé les spéculateurs. L'Opep peut tout à fait répondre que ce n'est pas son rôle d'ajouter plus de pétrole", a estimé Olivier Jakob, de Petromatrix.

En outre, la hausse actuelle du pétrole fait pâle figure face à celles de certaines matières premières menacées de relatives pénuries, comme le cuivre, qui vole de record en record.

Au début de la remontée du pétrole, en septembre, les réserves stratégiques américaines étaient à un niveau record. Elles ont depuis diminué.

En plus des stocks existants, l'Opep dispose d'une réserve de capacité de production non négligeable, fixée à 6 millions de barils par jour (bpj).

La production irakienne constitue également une marge de manoeuvre. Le pays, qui remet sur pied son économie et ses infrastructures ravagées par la guerre et les sanctions, n'est en effet pas soumis aux plafonds de production de l'Opep.

Les analystes doutent de sa capacité à augmenter en sept ans sa production jusqu'à 12 millions de bpj, mais même un rythme plus lent permettrait de répondre à toute hausse de la demande.

Le nouveau ministre irakien du Pétrole souhaite que la production nationale soit portée à 3 millions de bpj fin 2011, contre 2,6 millions de bpj aujourd'hui.

Avec Dmitri Jdannikov, Gregory Schwartz pour le service français, édité par Gwénaelle Barzic