par Jan Strupczewski et Silvia Aloisi

Ces propos de Joaquin Almunia interviennent alors qu'un important indicateur économique a montré une accélération de la contraction de l'activité dans l'industrie grecque, contrairement à la tendance observée dans la majeure partie de la zone euro.

La Commission européenne doit publier mercredi ses recommandations sur le plan d'austérité du gouvernement grec, censé ramener le déficit sous la barre de 3% du produit intérieur brut (PIB) en 2012 contre 12,7% en 2009.

Ce dernier chiffre a sérieusement entamé la confiance des investisseurs envers Athènes, ce qui s'est traduit sur les marchés par une envolée des rendements des emprunts d'Etat grecs et, par contagion, par une baisse de l'euro.

Les difficultés de la Grèce ont en effet alimenté les spéculations sur son possible renflouement par l'Union européenne, ainsi que les craintes de contagion à d'autres pays affaiblis et endettés de la zone euro.

"Voici ce que nous disons aux autorités grecques : votre programme de stabilité s'est fixé des objectifs ambitieux et nous souscrivons pleinement à ces objectifs ambitieux", a déclaré Joaquin Almunia lors d'un entretien exclusif à Reuters.

"A nos yeux, la réalisation de ces objectifs sur les trois prochaines années, avant la fin de 2012, est une absolue nécessité. Ces objectifs sont réalisables mais ils ne sont pas dénués de risques."

Illustration de ces risques, l'indice des directeurs d'achats grecs, publié lundi, est tombé en janvier à son plus bas niveau depuis huit mois alors que ce baromètre est en hausse dans les grands pays de la zone euro, comme l'Allemagne et la France.

L'économie grecque a subi l'an dernier sa première récession en 16 ans, avec une contraction de 1,2%. Athènes table sur une nouvelle baisse cette année, de 0,3%.

LA GRECE EN RETARD SUR LA ZONE EURO

"Le cycle économique grec est en retard d'au moins six mois sur celui de la zone euro", explique Nikos Magginas, économiste à la Banque nationale de Grèce.

"Dans le même temps, la mauvaise situation budgétaire et le sentiment général d'incertitude créé par les tensions sur les marchés sur le service de la dette grecque pèsent sur la confiance des entreprises et retardent les décisions d'investissement."

Le gouvernement socialiste au pouvoir à Athènes depuis octobre s'est engagé à augmenter les prélèvements obligatoires sur les hauts revenus et à aider les plus pauvres. Il a également annoncé un gel des traitements des fonctionnaires supérieurs à 2.000 euros mensuels ainsi qu'un ralentissement des recrutements.

L'Union européenne l'encourage à mettre en oeuvre des mesures radicales sur le modèle de celles adoptées par l'Irlande, mais le gouvernement semble craindre les réactions de l'opinion publique, d'autant que des mouvements de grève sont déjà prévus pour les prochaines semaines.

Selon un article publié samedi par le quotidien grec Ta Nea, Bruxelles pourrait réclamer à Athènes une baisse des salaires du public et un plafonnement des retraites.

Joaquin Almunia a déclaré lundi que la Commission surveillerait de près les progrès accomplis. "Nous n'accepterons pas d'écart par rapport au chemin menant à la réalisation des objectifs. En cas d'écart provoqué par la matérialisation des risques, nous demanderons des mesures correctives", a-t-il dit.

De son côté, Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des Finances, a déclaré que l'union monétaire engageait chacun de ses membres à tenir ses engagements.

"Si ces engagements ne sont pas tenus ou si l'on vit durablement au-dessus de ses moyens, on en paie le prix et personne ne peut échapper à cela", a-t-il dit dans un entretien à Reuters.

"La solidarité européenne signifie maintenant qu'il faut dire clairement à la Grèce qu'il n'y a pas d'autre moyen que d'apporter des corrections durables aux erreurs du passé", a-t-il ajouté.

Les recommandations de la Commission européenne seront adoptées par les ministres des Finances de l'Union européenne lors de la prochaine réunion des 15 et 16 février.

La Grèce devra faire un premier point sur la mise en oeuvre de son plan financier le 16 mars. Un deuxième est prévu le 15 mai et Athènes devra ensuite en faire un tous les trois mois.

Sur les marchés, l'écart de rendement entre les emprunts grecs et allemands à 10 ans, qui mesure la prime réclamée par les investisseurs pour détenir des titres émis par Athènes, est revenu à 342 points de base en fin de journée lundi, contre un record d'environ 405 points jeudi.

Version française Benoit Van Overstraeten et Marc Angrand, édités par Danielle Rouquié