par Gabriela Baczynska

BRUXELLES, 9 février (Reuters) - Les dirigeants de l'Union européenne ont indiqué jeudi qu'ils allaient renforcer leurs frontières afin de repousser les migrants non désirés, certains pays appelant à ériger barrières et murs tandis que d'autres privilégient des investissements pour améliorer la qualité de vie dans des régions défavorisées.

L'Autriche, les Pays-Bas, la Belgique, l'Irlande et le Danemark font partie des pays ayant exprimé lors d'un sommet à Bruxelles leur préoccupation face au nombre croissant d'arrivées irrégulières - quelque 330.000 traversées ont été recensées l'an dernier.

S'exprimant devant la presse, le Premier ministre irlandais Leo Varadkar a déclaré que "les pays européens subissent une importante augmentation du nombre de personnes arrivant depuis l'extérieur de l'Europe à intervalles réguliers".

"Il est important que nous, Européens, décidions de qui entre dans nos pays, et non pas les trafiquants d'être humains (...) Ceux qui obtiennent le statut de réfugié ont le droit de rester mais les autres, non, ils doivent repartir", a-t-il ajouté.

Depuis que plus d'un million de réfugiés ont franchi la Méditerranée pour rejoindre l'Europe en 2015, un flux migratoire provoqué essentiellement par la guerre en Syrie, l'immigration est devenue une question politique hautement délicate. A l'époque, cette crise migratoire avait suscité d'amères divisions entre pays du bloc sur l'accueil des réfugiés.

Faute d'un accord en la matière, les dirigeants de l'UE ont décidé de renforcer les frontières afin d'empêcher les migrants venus principalement du Moyen-Orient et d'Afrique d'arriver en Europe, en dépit de critiques sur le caractère inhumain d'une telle politique et d'une nécessité de recourir à la main-d'oeuvre étrangère pour combler des pénuries dans certains pays.

"FORTERESSE"

D'après un rapport du Parlement européen, l'UE comptait l'an dernier plus de 2.000 kilomètres de barrières et murs frontaliers, contre à peine plus de 300 kilomètres en 2014.

La réouverture des frontières post-pandémie de coronavirus a relancé les arrivées irrégulières dans l'UE, qui ont atteint l'an dernier un pic inédit depuis 2016, faisant réapparaître chez des dirigeants une rhétorique agressive sur l'immigration.

"Nous devons mettre un frein à l'immigration illégale dans l'UE", a déclaré le chancelier autrichien Karl Nehammer. "Nous avons besoin d'argent pour cela, peu importe qu'on appelle ça des barrières ou des murs. La Bulgarie a besoin d'aide en matière de surveillance des frontières. Une clôture est efficace seulement avec une surveillance appropriée".

La Commission européenne, qui gère le budget commun du bloc, refuse de longue date de financer des murs frontaliers, contrairement aux équipements de surveillance et autres infrastructures.

Le Premier ministre luxembourgeois Xavier Bettel s'est dit défavorable à cette hypothèse, citant l'héritage de l'Europe qui a surmonté les divisions et créé une zone dans laquelle les personnes peuvent franchir les frontières librement.

Alors que l'Italie prône davantage d'aides financières à l'Afrique, la Hongrie veut massivement ériger des murs, tandis que la France estime que l'UE doit lutter contre la pauvreté et le terrorisme à travers le monde.

Bâtir une "forteresse" n'est pas la réponse, a déclaré le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, ajoutant qu'il fallait que l'UE offre aux migrants des moyens légaux pour entrer dans le territoire européen. "Les gens se déplacent parce qu'il n'y a pas de futur, pas de paix, pas de stabilité dans leurs pays", a-t-il dit. (Reportage Gabriela Baczynska; version française Jean Terzian)