(Complété § 7-8 avec nouvelle interview du PM)

LE CAIRE, 28 août (Reuters) - L'Egypte ne devrait pas interdire les Frères musulmans ou les exclure du processus politique après le renversement par l'armée de Mohamed Morsi, a déclaré le Premier ministre par intérim, revenant sur de précédents propos à ce sujet.

Hazem el Beblaoui avait proposé le 17 août une dissolution de la confrérie islamiste dont est issu Mohamed Morsi, premier président démocratiquement élu en Egypte et destitué le 3 juillet.

Dans une interview accordée à la presse d'Etat mardi soir, Hazem el Beblaoui dit que le gouvernement préfère surveiller le groupe et sa vitrine politique et que son avenir sera déterminé par les actes de ses membres.

"Dissoudre le parti ou le groupe n'est pas la solution. C'est mauvais de prendre des décisions dans une période agitée", a déclaré le Premier ministre selon l'agence de presse officielle Mena.

"Il est préférable pour nous de surveiller les partis et les groupes dans le cadre d'une action politique sans les dissoudre ni les faire agir dans la clandestinité."

Le Premier ministre a fait cette proposition au ministre des Affaires sociales, qui est responsable de l'agrément accordé aux associations et organisations non-gouvernementales (ONG).

Toutefois, il a paru tempérer ses propos dans un autre entretien accordé au journal Al Chorouk dans lequel il affirme qu'une partie de la société égyptienne "pense que les Frères ne souhaitent pas vraiment la réconciliation". Il suggère de faire preuve de "réalisme" à cet égard.

Le chef du gouvernement par intérim ajoute que les Egyptiens de la rue "redoutent une réconciliation avec des gens qui usent de la force".

Fondé en 1928, les Frères musulmans avaient été dissous par le régime militaire de Nasser en 1954.

DESOBEISSANCE CIVILE

Tout en étant hors la loi sous le régime de l'ancien président Hosni Moubarak, la confrérie menait des actions caritatives et ses membres participaient en tant qu'indépendants à quelques élections.

Après plusieurs décennies dans l'ombre, les Frères se sont fait enregistrer comme ONG en mars pour répondre à une action en justice que leur avait intenté des adversaires qui contestaient la légalité du mouvement.

Les Frères musulmans ont également une émanation politique légalement enregistrée, le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), constitué en 2011 après le soulèvement qui a renversé Hosni Moubarak.

Mais Mohamed Morsi s'est aliéné une grande partie de la société égyptienne toutes tendances politique confondues après une année de pouvoir.

Depuis, la répression très dure lancée par le nouveau régime soutenu par l'armée contre les pro-Morsi et les affrontements qui ont suivi ont fait un millier de morts.

La Coalition nationale de soutien à la légitimité et au refus du coup d'Etat, à laquelle appartiennent les Frères musulmans et qui réclame la réintégration de Mohamed Morsi, a appelé à des manifestations de protestation vendredi dans les rues et les places de toutes les grandes villes des 27 provinces égyptiennes.

Elle a également annoncé qu'elle allait lancer "un plan de désobéissance civile pacifique". Un journal du PLJ, sous le titre "Boycottez les assassins !", publie un encart publicitaire invitant les Egyptiens à ne pas regarder les chaînes de télévision de "l'ancien régime", à ne pas acquitter les impôts à un gouvernement "qui est en train de nous tuer" et à boycotter les produits fabriqués par des entreprises accusées de soutenir l'actuel gouvernement.

Le gouvernement intérimaire s'est engagé à organiser de nouvelles élections présidentielle et législatives dans les mois qui viennent après l'adoption d'une nouvelle Constitution. (Lin Noueihed, Danielle Rouquié et Jean-Loup Fiévet pour le service français, édité par Gilles Trequesser)