Londres (awp/afp) - Le Brexit va nettement ralentir la croissance économique du Royaume-Uni l'année prochaine et le contraindre à emprunter davantage, a annoncé le ministre britannique des Finances.

La décision de quitter l'Union européenne va "changer le cours de l'histoire britannique", a souligné mercredi Philip Hammond devant le Parlement dans sa déclaration budgétaire d'automne, sa première depuis le vote des Britanniques pour la sortie de l'Union européenne.

Si la croissance du pays a bien résisté en 2016 - avec 2,1% escompté -, le pays doit s'attendre à un fort recul l'an prochain. L'Office public de responsabilité budgétaire (OBR) a en effet abaissé sa prévision à 1,4%, contre 2,2% prévu en mars dernier.

M. Hammond a évoqué comme principales causes "une baisse des investissements et une demande plus faible", conséquences de l'incertitude qui règne désormais et de l'accélération de l'inflation pour cause de dépréciation de la livre.

- Dette alourdie -

Au total, en raison du vote pour le Brexit, le Royaume-Uni va perdre 2,4 points de croissance sur la période 2016-2021, a précisé l'OBR, plombant d'autant les prévisions de recettes fiscales.

Le déficit public devrait être bien plus élevé que prévu d'ici à 2021, avec une augmentation des emprunts de 122 milliards de livres (143 milliards d'euros) sur cinq ans. La moitié est une conséquence directe du Brexit et le reste est lié à la volonté du gouvernement de donner un peu d'air à l'activité et aux ménages après des années d'austérité.

Le ministre des Finances a renvoyé un hypothétique retour à l'équilibre budgétaire au-delà de 2020.

L'opposition travailliste a dénoncé un échec fondamental des conservateurs malgré une sévère cure d'austérité engagée depuis leur retour au pouvoir en 2010. "Les annonces d'aujourd'hui marquent l'échec lamentable des six derniers années et n'offrent aucun espoir pour l'avenir", a tonné John McDonnell, le ministre des Finances du gouvernement "fantôme" travailliste.

Sous contrainte budgétaire, le gouvernement conservateur n'a pu annoncer de mesure de relance spectaculaire, afin de ne pas détériorer les comptes publics qui s'étaient quelque peu redressés.

Le nouvel exécutif arrivé au pouvoir après le référendum aurait rêvé pouvoir offrir de beaux cadeaux aux familles modestes, dont beaucoup ont voté pour le Brexit, mais a finalement dû se borner à quelques gestes en faveur des ménages et des milieux d'affaires.

- Coup de pouce aux ménages -

L'annonce la plus emblématique est une hausse du salaire minimum qui passera à 7,5 livres brut de l'heure (l'équivalent de 8,8 euros) à partir d'avril 2017, soit une hausse de 4%. Un coup de pouce bienvenu quand la hausse des prix menace le pouvoir d'achat.

Le ministre des Finances veut en outre supprimer les frais d'agences immobilières versées par les locataires au moment de signer un contrat. Il entend toutefois aussi soutenir le secteur immobilier, promettant des investissements de 1,4 milliard de livres pour aider à la construction de 40.000 nouveaux logements.

Il a par ailleurs annoncé la création d'un fonds d'investissement de 23 milliards de livres pour améliorer la productivité dans les années à venir en soutenant la recherche et développement, les réseaux routiers ou encore la fibre optique.

La principale organisation patronale, la CBI, a espéré que ces mesures se concrétisent vite: "ce n'est que lorsque des tarmacs, des routes et des câbles auront été posés qu'ils doperont l'investissement, les emplois et la croissance", a souligné sa directrice générale Carolyn Fairbairn. Elle a aussi appelé le pouvoir à être attentif aux effets pervers de l'inflation et de l'incertitude pour les entreprises.

Sur le plan fiscal, le ministre des Finances a simplement rappelé que l'impôt sur les sociétés, actuellement de 20%, allait passer à 17% d'ici à 2020, ce qui en fera le plus faible de tous les pays du G20.

Au chapitre des bonnes nouvelles, le Royaume-Uni a légèrement relevé ses prévisions de croissance pour 2016, de 0,1 point.

afp/rp