* Laurent Fabius numéro deux de l'équipe gouvernementale

* Martine Aubry, en accord avec Hollande, a décliné un poste

* Pierre Moscovici à Bercy

PARIS, 16 mai (Reuters) - François Hollande et son Premier ministre Jean-Marc Ayrault ont nommé mercredi un gouvernement respectueux des diverses sensibilités socialistes, marqué par le retour aux affaires d'un pilier de l'ère mitterrandienne, Laurent Fabius, et l'absence de Martine Aubry.

L'équipe compte 34 membres, 18 ministres et 16 ministres délégués, avec une parfaite parité hommes-femmes selon le voeu du nouveau président de la République.

Laurent Fabius, ancien Premier ministre de François Mitterrand, aujourd'hui âgé de 65 ans, accède aux Affaires étrangères, a annoncé le secrétaire général de la présidence, Pierre-René Lemas, sur le perron de l'Elysée. L'annonce est intervenue avec plusieurs heures de retard sur l'agenda initial, signe, semble-t-il, de la complexité des tractations.

Martine Aubry avait fait savoir plus tôt dans la journée, alors que les consultations n'étaient pas achevées, qu'elle ne ferait pas partie du gouvernement, en "bonne entente" avec François Hollande.

La première secrétaire du Parti socialiste, ancienne ministre du Travail de Lionel Jospin, battue par François Hollande lors de la primaire d'investiture du PS, souhaitait Matignon ou rien.

Le chef de l'Etat ayant préféré nommer à Matignon un fidèle, Jean-Marc Ayrault, moins marqué à gauche, elle a décliné un grand ministère. Un ministère de "'l'Intelligence", regroupant notamment la Jeunesse et la Culture, lui aurait été proposé.

La maire de Lille, qui ne briguera pas sa succession à la tête du Parti socialiste à l'automne, se concentrera sur son mandat et exercera une liberté de parole qui ne sera pas sans péril pour le président de la République.

MOSCOVICI À BERCY, VALLS À L'INTÉRIEUR

Pour affronter la crise, le président français et son Premier ministre ont fait confiance à Pierre Moscovici, qui se voit confier le portefeuille de l'Economie et des Finances alors qu'il visait le Quai d'Orsay. Jérôme Cahuzac, président de la commission des Finances de l'Assemblée, le secondera au Budget.

Michel Sapin, pressenti pour Bercy, est finalement nommé ministre du Travail, de l'Emploi et du Dialogue social. Le député-maire de Cherbourg, Bernard Cazeneuve, est nommé ministre délégué aux Affaires européennes.

Arnaud Montebourg, héraut de la "démondialisation", sera chargé d'un ministère du Redressement productif. La députée d'Indre-et-Loire Marisol Touraine, qui a notamment rédigé le projet de François Hollande sur les retraites, est nommée ministre des Affaires sociales et de la Santé.

Comme prévu, Manuel Valls, l'un des hommes à poigne du PS, classé à la droite du parti, dirigera le ministère de l'Intérieur. La députée guyanaise Christiane Taubira, candidate du Parti radical de gauche (PRG) à la présidentielle de 2002, hérite du portefeuille de la Justice.

Le député européen Vincent Peillon, agrégé de philosophie, est nommé ministre de l'Education nationale, portefeuille désormais deuxième dans l'ordre protocolaire. Il sera notamment chargé de mettre en oeuvre la promesse de François Hollande de créer 60.000 postes dans ce secteur en cinq ans.

Jean-Yves Le Drian, un ami de 35 ans de François Hollande, sera le prochain ministre de la Défense. Il avait pris contact durant la campagne présidentielle avec les administrations étrangères, notamment avec l'administration américaine pour préparer le sommet de l'Otan à Chicago, les 20 et 21 mai.

UNE ÉQUIPE "FÉMINISÉE"

Stéphane Le Foll, autre fidèle de François Hollande, est nommé à l'Agriculture et à l'Agroalimentaire après avoir été écarté de la première mouture du gouvernement. La défection surprise de Martine Aubry a rebattu les cartes.

L'aile gauche du PS, que devait incarner la maire de Lille au sein du gouvernement, sera représentée par son amie Marylise Lebranchu (ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique), Benoît Hamon (ministre délégué à l'Economie sociale et solidaire) et François Lamy (ministre délégué à la Ville).

Des figures de la jeune garde socialiste, Aurélie Filippetti, 38 ans (ministre de la Culture), Najat Vallaud-Belkacem, 34 ans (ministre des Droits des femmes et porte-parole), Delphine Batho, 39 ans (ministre déléguée auprès du ministre de la Justice), Fleur Pellerin, 37 ans (ministre déléguée aux PME, à l'Innovation et à l'Economie numérique).

Les proches de Ségolène Royal ne sont ainsi pas oubliés, avec Najat Vallaud-Belkacem, Delphine Batho et Dominique Bertinotti (Famille), sa directrice de campagne durant la campagne.

Outre le PRG, l'organigramme tient compte des sensibilités de la gauche à l'approche des élections législatives de juin, qui pourraient entraîner un remaniement à l'aune du rapport de forces issu des urnes. Outre le PRG, les écologistes sont intégrés, comme la secrétaire nationale d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Cécile Duflot, au Logement, et Pascal Canfin, ministre délégué au Développement.

Le Front de gauche emmené par Jean-Luc Mélenchon avait déclaré dès avant la présidentielle qu'il ne participerait pas à un gouvernement.

Le premier conseil des ministres du quinquennat Hollande se déroulera jeudi à 15h00.

"L'essentiel, c'est de se mettre au travail", a souligné Jean-Marc Ayrault mercredi matin lors d'une brève allocution après la passation de pouvoirs avec François Fillon. (Sophie Louet, édité par Gilles Trequesser)