PARIS, 29 septembre (Reuters) - L'effort budgétaire français sans précédent de 37 milliards d'euros pour 2013 n'est pas un handicap pour l'économie mais va au contraire redresser sa compétitivité, déclare le ministre de l'Economie Pierre Moscovici dans un entretien au Monde de dimanche.

Des économistes estiment que cette politique va compromettre l'objectif de croissance de 0,8% pour 2013 et donc par ricochet alourdir encore l'effort nécessaire pour atteindre l'objectif d'un déficit des finances publiques équivalent à 3% du PIB - la richesse nationale - en 2014. (Voir )

"La dette est l'ennemie de l'économie, des services publics, de notre souveraineté nationale. (Le ministre de l'Economie - NDLR) Pierre Bérégovoy parlait jadis de désinflation compétitive, je veux parler de désendettement compétitif", déclare Pierre Moscovici.

Pierre Bérégovoy, qui s'est suicidé en 1993 après une déroute électorale de la gauche, avait défendu sous la présidence Mitterrand la priorité donnée à la lutte contre l'inflation par rapport à la lutte contre le chômage.

Un reproche symétrique est fait aujourd'hui au gouvernement Ayrault, l'aile gauche de la majorité l'accusant de donner une trop grande priorité à la lutte contre les déficits par rapport au chômage - qui a dépassé les trois millions de personnes pour la première fois depuis 1999 - au risque d'échouer sur les deux tableaux.

Pierre Moscovici s'en défend. "Les 3% sont une nécessité et même un impératif", dit-il, soulignant que des pays ayant renoncé ou faibli sur cette voie ont vu leur chômage s'aggraver.

"Voilà pourquoi le chiffre de 3%, condition du désendettement et de retour de la croissance, n'est ni biaisé ni intenable. La France peut y parvenir. Elle le doit", dit-il.

Il assure que la prévision de croissance de 0,8% est "volontariste mais réaliste" et assure qu'il n'est pas question de renoncer aux engagements de réduction des déficits si ce chiffre faiblissait.

Répondant aux grands patrons, notamment ceux de l'automobile, qui demandent à l'Etat de leur donner plus de "compétitivité" - un terme qui signifie pour le patronat une baisse du coût du travail, une hausse de sa durée et la levée de diverses règles protectrices des salariés - Pierre Moscovici répond qu'il ne voit pas les choses comme eux.

"Ce qui fait qu'une entreprise investit, ce ne sont pas uniquement ses marchés et ses avantages fiscaux, ce sont d'abord ses marchés, ses clients", dit-il.

Il s'agit de restaurer d'abord l'offre et la demande, pour lui. "Le paquet compétitivité viendra ensuite, et nous en avons une vision extensive, qui ne se résume pas au coût du travail. La compétitivité passe d'abord par une Europe stable", dit-il.

"Le problème (du coût du travail) existe dans l'industrie mais il ne vient pas forcément de l'industrie elle-même", dit-il, parlant du coût des services marchands et proposant de réduire les coûts dans ces secteurs. (Thierry Lévêque)