LYON, 2 avril (Reuters) - Le procès de deux spécialistes de l'évasion classés parmi les détenus les plus dangereux de France s'est ouvert mardi après-midi devant la cour d'assises du Rhône protégée par un impressionnant dispositif de sécurité.

Escortés par le GIPN et surveillés par un hélicoptère, Christophe Khider et El Hadj Omar Top sont arrivés dans un palais de justice truffé, à l'extérieur comme à l'intérieur, par les hommes armés et cagoulés du Raid et du GIPN.

Les deux hommes ont multiplié les tentatives d'évasion, jusqu'à celle, spectaculairement réussie, mais pour deux jours seulement, du 15 février 2009 de la centrale de Moulins-Yzeure (Allier).

L'actuelle compagne de Christophe Khider a confié à la presse, à la veille du procès, sa certitude de voir le père de son enfant tenter une nouvelle fois sa chance à l'occasion de ces trois semaines d'audience.

Les deux détenus ont affiché leur mépris de la justice.

Christophe Khider, 41 ans, condamné jusqu'en 2038 pour des vols à main armée et la mort d'un otage, a commencé par refuser de décliner son identité. El Hadj Omar Top, 34 ans, même profil, condamné jusqu'en 2020, n'a pas obtempéré lorsqu'on lui a demandé de se lever devant la cour.

Tous deux n'ont pas hésité non plus à couper le président pour intervenir et poser leurs questions ou à faire interrompre l'audience en milieu d'après-midi pour prendre une collation.

Ils se sont étonnés du nombre croissant de parties civiles déclarées, au nombre de 36, comprenant syndicats, associations, institutions, surveillants de prison, policiers, et automobilistes croisés sur le chemin de leur fuite.

"Ils nous ont torturés pendant des années, et ils viennent ici jouer les victimes?", a dit El Hadj Omar Top.

"Dans cette affaire, si le sang a coulé, c'est celui de mon client. Alors pourquoi tous ceux-là, qui n'ont rien eu, sont-ils partie civile", s'est étonné maître Bernard Riper, avocat de Christophe Khider.

Une occasion pour lui de faire le procès de l'univers carcéral et de justifier la volonté d'évasion de son client.

"Christophe Khider va de prison en prison, on lui fait vivre l'inadmissible, enfermé 23 heures sur 24 dans 9 m2. Comment voulez-vous que dans ces circonstances, qu'il n'ait pas un besoin viscéral, fondamental de chercher à s'évader ?"

A leurs côtés siègent également sur le banc des accusés au titre de complices deux femmes et un codétenu accusés d'avoir facilité l'évasion du 15 juin 2009.

Sylvie Piciotti, 41 ans, l'ex-compagne de Christphe Khider, aurait organisé l'évasion en faisant entrer au parloir de Moulins des pains d'explosifs, une arme à feu et des tournevis. Elle aurait utilisé Nadia Kabouche, 32 ans, la compagne du codétenu Eugène Baeb pour faire entrer le matériel.

Cette dernière avait l'avantage d'être porteuse d'une prothèse à la colonne vertébrale qui l'autorisait à faire sonner le portique sans alerter les surveillants. C'est ainsi qu'elle aurait réussi à introduire à plusieurs reprises du matériel scotché entre ses omoplates par Sylvie Piciotti.

Le verdict est attendu pour le 19 février. (Catherine Lagrange, édité par Yves Clarisse)