* La défense de l'ex-trader demande un sursis

* La cour donnera sa décision le 29 janvier

* Un marathon entamé il y a huit ans (Actualisé avec précisions et démenti de Chantal de Leiris §§ 11-12)

VERSAILLES, Yvelines, 20 janvier (Reuters) - Le nouveau procès civil de Jérôme Kerviel, rejugé pour sa responsabilité dans la perte de 4,9 milliards d'euros subie par la Société Générale en 2008, a été provisoirement suspendu mercredi par la cour d'appel de Versailles.

Les juges ont mis en délibéré au 29 janvier leur décision concernant un sursis à statuer demandé par la défense de l'ex-trader, pour qui le marathon judiciaire a commencé il y a huit ans presque jour pour jour.

Selon les avocats de Jérôme Kerviel, il faut attendre en particulier une autre décision, celle de la commission d'instruction de la Cour de révision qui se prononcera le 21 mars sur la recevabilité d'une demande de nouveau procès pénal.

Ils affirment par ailleurs qu'un "fait nouveau", en l'occurrence la publication d'un enregistrement clandestin des propos d'une ancienne magistrate du parquet de Paris, rebat les cartes dans ce dossier. (voir )

"C'est satisfaisant pour nous. Nous prétendions que ce procès ne pouvait pas se tenir pendant ces trois jours. Nous sommes renvoyés au 29 janvier et donc ce procès ne se sera pas tenu pendant ces trois jours", a déclaré l'avocat de Jérôme Kerviel David Koubbi à l'issue de l'audience.

"Ce sont des spécialistes du dilatoire", a quant à lui déploré Jean Veil, avocat de la Société Générale.

Le 29 janvier, la cour d'appel de Versailles pourra décider d'un renvoi intermédiaire après le 21 mars comme le suggère l'avocat général, d'un sursis à statuer comme le souhaite la défense de Jérôme Kerviel ou de la tenue de ce procès civil.

Il s'est brièvement ouvert deux jours après la publication de l'enregistrement des propos de l'ancienne magistrate qui, d'après la défense de l'ex-trader, vient accréditer la thèse selon laquelle la banque connaissait ses agissements.

Selon des extraits de retranscriptions diffusés par Mediapart et 20 Minutes, Chantal de Leiris, qui a suivi cette affaire, affirme également que la Société Générale a "manipulé" l'enquête.

"NOUVELLE MANIPULATION MEDIATIQUE"

"Quand vous en parlez, tous les gens qui sont un peu dans la finance, ils rigolent, sachant très bien que la Société générale savait. La Société générale savait, savait, c'est évident, évident", déclarait-elle en juin 2015.

Disant avoir été enregistrée de façon "déloyale", Chantal de Leiris a déclaré au Monde, dans son édition datée de jeudi, qu'il n'y avait pas eu de dysfonctionnement et qu'elle n'avait subi aucune pression dans la conduite de son travail.

Chantal de Leiris évoque notamment le classement sans suite des plaintes initiales déposées contre la banque par l'ex-trader, qui a finalement obtenu l'ouverture d'une information judiciaire mais en se constituant partie civile.

"Les deux enquêtes menées ont été objectivement conduites avec rigueur et toutes les auditions qui devaient l'être ont été faites", a-t-elle répondu au quotidien.

Les avocats de la Société Générale déplorent quant à eux des manipulations médiatiques destinées à gagner du temps.

Jérôme Kerviel a été condamné définitivement à cinq ans de prison dont trois fermes en avril 2014.

Mais la Cour de cassation a rejeté la somme de 4,9 milliards d'euros de dommages-intérêts demandée par la Société Générale, soit l'équivalent de sa perte, en reprochant à la banque d'avoir failli dans ses mécanismes de contrôle.

Prié lundi sur BFM TV de dire si la demande de la banque n'était pas surréaliste, l'avocat de la Société générale, Jean Veil, a répondu : "De toute façon, il ne les paiera pas, personne ne les lui réclamera".

Jérôme Kerviel soutient depuis le départ que la banque connaissait ses prises de risques sur les marchés et qu'elle les a couvertes. Il a porté plainte contre son ancien employeur pour faux, escroquerie au jugement et subornation de témoin.

Dans l'enregistrement effectué à son insu selon les proches de Jérôme Kerviel et diffusé dimanche dernier, la magistrate se confie à Nathalie Le Roy, la policière de la Brigade financière alors en charge de l'enquête, et qui avait elle-même exprimé ses doutes sur le dossier.

David Koubbi, l'avocat de Jérôme Kerviel, estime que "le parquet s'est gravement compromis" et demande à François Hollande et Christiane Taubira (ministre de la Justice) "de mettre un terme à ces dysfonctionnements". (Gérard Bon et Simon Carraud, édité par Yves Clarisse)