* La mesure en vigueur avant le 6 mai?

* Un dispositif anti-social, selon Moscovici

* Un remède aux délocalisations (Actualisé avec déclarations, précisions)

PARIS, 3 janvier (Reuters) - La "TVA sociale", que la majorité maudissait depuis les élections législatives de 2007, est désormais l'une des mesures emblématiques de l'entreprise de reconquête électorale de Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2012.

Evoqué par le chef de l'Etat lors de ses voeux aux Français le 31 décembre, ce dispositif devrait devenir réalité avant le 6 mai, a assuré mardi la ministre du Budget et porte-parole du gouvernement, même si la proximité de l'élection présidentielle de 2012 fait peser des doutes sur ce calendrier.

"La TVA sociale, nous allons la faire et nous allons la faire avant l'élection présidentielle", a dit Valérie Pécresse sur France Info, sans rien préciser de ses modalités, qui seront débattues lors du sommet social du 18 janvier, à l'Elysée.

Lors de son intervention radiotélévisée, le président de la République a insisté sur la taxation des importations pour financer la protection sociale : "Il faut (..) faire contribuer financièrement les importations qui font concurrence à nos produits avec de la main-d'÷uvre à bon marché".

Environ 15% des biens et services consommés en France sont aujourd'hui importés.

"Aujourd'hui, sur 100 euros de salaire brut, en Allemagne, vous avez un coût qui est de 39 euros pour les charges. En France, c'est 50 euros", a fait valoir le ministre du Travail, Xavier Bertrand, sur France 2.

La "TVA sociale" consiste à affecter une partie du produit de la taxe sur la valeur ajoutée au financement de la protection sociale. En clair, on transfère une partie des cotisations sociales des employeurs sur une hausse de la TVA.

ANTI-DELOCALISATIONS

L'opposition de gauche estime que ce dispositif non progressif pénaliserait au premier chef les ménages modestes, la part des revenus consacrée à la consommation étant plus importante dans les catégories populaires.

"L'augmentation de la TVA, ça ne peut pas être social", a souligné sur Europe 1 le directeur de campagne du candidat socialiste, Pierre Moscovici.

François Hollande a suggéré durant la campagne de la primaire socialiste une "contribution écologique" à la charge des entreprises se substituant à la taxe sur le travail.

Le centriste François Bayrou, qui prône une hausse générale de deux points de la TVA, a pour sa part exprimé mardi ses réserves sur "la course à l'effondrement du prix du travail".

Les défenseurs de la mesure soulignent ses effets bénéfiques pour la compétitivité et ses vertus "anti-délocalisations" puisqu'elle modifie l'équilibre entre producteurs locaux, délestés de charges, et importateurs en relevant mécaniquement les prix des produits importés.

Trois taux de TVA sont en vigueur en France : 2,1% pour les médicaments et la presse, un taux de base de 19,6% et un taux intermédiaire qui a été relevé au 1er janvier de 5,5% à 7% sauf pour l'énergie, l'alimentation et les équipements et services pour handicapés. Pour le livre, le nouveau taux de 7% s'appliquera à compter du 1er avril.

La TVA est, de loin, la première source de recettes de l'Etat français : 136,9 milliards sur un total de 273,1 milliards prévu pour 2012, soit 50,1%.

Lors de la campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy avait proposé d'"expérimenter" la TVA sociale sur deux ans, avec une clause de rendez-vous annuelle pour "observer l'évolution des prix", alors que le gouvernement de l'époque écartait une telle mesure en raison de ses risques inflationnistes.

ENRE 22.000 ET 47.000 EMPLOIS?

La "TVA sociale" avait été enterrée dans l'entre-deux-tours des législatives en juin de la même année après que Jean-Louis Borloo, alors ministre de l'Economie, eut révélé maladroitement le soir du premier tour que cette idée était à l'examen.

Une "bourde" à laquelle les élus UMP imputèrent la perte de 60 à 80 sièges à l'Assemblée dont celui d'Alain Juppé, qui démissionna du gouvernement à la suite de sa défaite à Bordeaux.

Mais le projet n'a jamais déserté les tiroirs de l'exécutif. Dans un rapport commandé en 2007 par le Premier ministre François Fillon, les services de Bercy estimaient qu'un relèvement d'un point et demi du taux normal de TVA, conjugué à une baisse de deux points (environ 9 milliards d'euros) des cotisations sociales, créerait entre 22.000 et 47.000 emplois.

L'hypothèse a été relancée fin 2010 par le secrétaire général de l'UMP Jean-François Copé, qui y était initialement hostile.

Dans son projet pour 2012, le parti présidentiel propose de transférer 35 milliards d'euros de cotisations familiales vers une "fiscalité anti-délocalisation qui rétablit des conditions de concurrence équitables pour les salariés français".

Le parti présidentiel évalue à près de 10% la diminution du coût du travail qui résulterait de cette mesure. "Cette fiscalité anti-délocalisation jouera sur plusieurs leviers", explique-t-il : "l'impôt sur les sociétés des grands groupes (...) la fiscalité sur le capital, la CSG (contribution sociale généralisée) et la TVA."

L'UMP promet de chercher avec les partenaires sociaux le meilleur équilibre entre ces leviers. Selon le président du groupe UMP à l'Assemblée, Christian Jacob, Nicolas Sarkozy souhaite "une assiette la plus large possible", ce qui signifie que cela pourrait aller au-delà de la TVA. (Sophie Louet et Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)