* Des pertes d'un milliard d'euros par an à partir de 2020

* Nécessité de mettre en place des "coefficients de soutenabilité"

* Les syndicats veulent revoir la décote/surcote

PARIS, 1er février (Reuters) - Le régime des retraites complémentaires Agirc-Arrco, fusionnées au 1er janvier 2019 pour améliorer leur santé financière globale, devrait à nouveau passer dans le rouge en 2020 si aucune réforme n'est menée, selon des projections fournies par l'administration aux partenaires sociaux.

Le régime actuel, qui devait s'approcher de l'équilibre en 2019, connaîtrait des pertes d'un milliard d'euros par an environ à partir de 2020, selon les administrateurs.

Les réserves, qui doivent égaler au moins six mois de prestations, passeraient sous cette limite en 2025 dans le meilleur des scénarii et 2024 dans le pire. Elles seraient totalement épuisées en 2028 ou 2029 selon les scénarii.

Les partenaires sociaux, qui se rencontraient pour une première séance de négociation jeudi, doivent dans les prochaines semaines définir des "coefficients de soutenabilité" à appliquer sur la valeur d'achat ou la valeur de service du point (qui sert à calculer les pensions) afin d'assurer la pérennité du régime.

Les administrateurs se sont pour l'instant penchés sur la deuxième option.

Pour que le montant des réserves respecte la règle des six mois de prestations sur un horizon de 15 ans, il faudrait diminuer les retraites d'un certain montant et, selon l'effort consenti, les réserves seraient épuisées en 2050 au plus tard.

Pour le Medef, cela signifie qu'on ne peut pas revoir le coefficient de minoration ou de majoration en vigueur depuis le 1er janvier 2019, coefficient qui incite les bénéficiaires à retarder leur départ à la retraite, comme le réclament la CFDT, FO et la CGT au regard des performances financières de 2017.

UNE DÉCOTE DE 10%

Cette décote diminue de 10% pendant trois ans le montant des pensions des personnes qui partent à la retraite dès qu'elles obtiennent le taux plein. A l'inverse, le mécanisme les augmente de 10% pendant un an lorsqu'elles partent deux ans après l'obtention du taux plein ou encore de 20% et de 30% pendant un an lorsque quelqu'un part trois et quatre ans après.

"La conjoncture économique a été relativement favorable l'année dernière", a dit jeudi le négociateur du Medef Claude Tendil. "Mais on voit que les choses s'inversent."

"On ne peut pas renégocier l'accord tous les trois mois en fonction de la conjoncture économique", a-t-il ajouté. "Il faut qu'on ait un cadre de long terme."

Pour la CFDT, ces projections peuvent être remises en question, notamment le rendement des réserves. "Les réserves n'ont jamais été pensées comme un outil de gestion sur le long terme", a dit le négociateur du syndicat Frédéric Sève.

"On a sans doute plus de marge de manoeuvre qu'on pourrait spontanément croire. Pour nous, il faut un geste pour les retraités et les salariés".

Force ouvrière entend également revenir sur l'accord de 2015. "L'accord était déséquilibré", a dit à Reuters Philippe Pihet. "Les salariés et retraités ont réalisé 76,5% de l'effort, et les entreprises 23,5%".

Pour la CGT, le coefficient de minoration et de majoration est une façon de "brouiller les repères de l'âge de départ à la retraite".

Les partenaires sociaux ont prévu de se revoir fin mars ou début avril pour une nouvelle séance de négociation. (Caroline Pailliez, édité par Yves Clarisse)