* Des négociations suivies par le gouvernement

* Leur enjeu dépasse le sort des "seuils sociaux"

* Concessions du Medef et entrée de la CGT dans le jeu

par Emmanuel Jarry

PARIS, 20 novembre (Reuters) - Les partenaires sociaux ont désormais abattu leurs cartes dans les négociations sur la réorganisation du dialogue social dans les entreprises, qui reprennent vendredi sous le regard attentif d'un pouvoir politique soucieux de relancer l'emploi en France.

Le sort des "seuils sociaux", qui déclenchent de nouvelles obligations pour les employeurs en fonction des effectifs de leur entreprise, est un des points durs mais les enjeux de ces discussions vont bien au-delà de cette question.

Le gouvernement dit vouloir faire du dialogue social un outil "efficace au service de la compétitivité des entreprises" et le ministre de l'Economie fait le pari qu'il permettra de réformer le marché du travail.

Emmanuel Macron estime notamment que la durée du temps de travail pourrait être modulée par des accords majoritaires dans l'entreprise ou la branche, ce qui rejoint les préoccupations du Medef mais inquiète les syndicats.

Le ministre du Travail a donné aux partenaires sociaux jusqu'à la fin de l'année pour s'entendre mais on admet de source proche de l'exécutif que le climat est "assez tendu" et on évalue les chances d'un accord à "50-50".

Les positions de départ des syndicats et du patronat, lui-même tiraillé par de profondes divergences, étaient si éloignées que la séance prévue le 13 novembre a été reportée d'une semaine pour permettre au Medef de multiplier les réunions bilatérales.

Dans une nouvelle mouture de ses propositions, la première organisation patronale française fait quelques concessions aux syndicats, au prix d'une rupture du front patronal avec la CGPME et l'Union professionnelle artisanale (UPA).

Le Medef propose toujours de fusionner les instances représentatives du personnel (IRP) en un "conseil d'entreprise" unique. Mais il ne se limite plus aux entreprises de 50 salariés et plus, ce qui avait fait hurler les syndicats.

Il propose que dans les sociétés de 11 à 49 salariés, le conseil d'entreprise reprenne les prérogatives et les moyens actuels des délégués du personnel et puisse, comme dans celles de 50 salariés et plus, négocier des accords avec l'employeur.

LA CGT PRÊTE À JOUER LE JEU ?

Il propose également de conserver aux syndicats un rôle spécifique dans la négociation des accords d'entreprise.

Ces concessions seront probablement insuffisantes mais un autre fait nouveau est intervenu : contrairement aux fois précédentes, la CGT a montré une véritable volonté de jouer le jeu en mettant sur la table des propositions très concrètes.

Elle propose notamment d'assurer la représentation collective du personnel des entreprises de moins de 50 salariés par des délégués élus dès que deux d'entre eux le demandent ou par l'élection de représentants au sein de "comités paritaires territoriaux" extérieurs à l'entreprise, à l'image de ce qui existe déjà dans l'artisanat ou l'agriculture.

Cela revient de facto à supprimer le seuil de 11 salariés, qui déclenche aujourd'hui une obligation d'organiser un scrutin interne, en réalité peu respectée dans les PME concernées.

La CGT propose également de simplifier et de rationaliser le processus d'information et de consultation des IRP.

La CFDT, la CFTC, la CFE-CGC et Force ouvrière proposent également des dispositifs inspirés, à des degrés divers, des Commissions paritaires interprofessionnelles de l'artisanat (Cpria) pour assurer la représentation des salariés des très petites entreprises (TPE).

La CGPME et l'UPA, qui ont décidé de ne pas s'associer aux nouvelles propositions du Medef, n'ont en revanche pas prévu de présenter vendredi leur propre plate-forme.

"Est-ce qu'on présentera un autre texte ? On ne se l'interdit pas mais pas vendredi", a ainsi déclaré à Reuters la vice-présidente de la CGPME, Geneviève Roy. "Je vais voir comment est reçu le texte du Medef." (Avec Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)