* La direction du parti remaniée

* Des doutes persistants sur le programme (Actualisé après bureau politique)

par Simon Carraud

PARIS, 29 novembre (Reuters) - François Fillon, qui s'efforce depuis dimanche d'asseoir son autorité sur la droite, a remanié mardi Les Républicains (LR) pour en faire une machine électorale à son service en vue de la présidentielle de 2017 et s'éviter de futures dissensions.

Son plébiscite à la primaire n'a pas fait taire tous les sceptiques dans l'entourage des perdants, où l'on continue à plaider pour un infléchissement du programme, mais il lui a donné toute latitude pour réorganiser sa formation, en commençant par rétrograder Laurent Wauquiez.

Jusque-là président par intérim, ce sarkozyste jugé peu fiable par les fillonistes partage désormais le titre de vice-président avec une fidèle de François Fillon, Isabelle Le Callennec, tandis que Bernard Accoyer est promu au secrétariat général.

Deux autres hommes de confiance de l'ex-Premier ministre, Jean-François Lamour et Gérard Larcher, sont placés à des postes stratégiques, le premier à la commission des investitures, dirigée jusque-là par le sarkozyste Christian Estrosi, le second à la tête d'un comité politique nouvellement créé.

Patrick Stefanini, cheville ouvrière de la campagne de François Fillon, a par ailleurs annoncé à la presse qu'il serait prochainement directeur général, poste jusque-là occupé par un autre membre du premier cercle sarkozyste, Frédéric Péchénard.

"S'agissant du fonctionnement d'un mouvement politique, il est normal qu'il réponde aux attentes du candidat issu de la primaire", a justifié Jérôme Chartier, fidèle parmi les fidèles de François Fillon, à l'issue du bureau politique où le remaniement a été entériné.

Le comité politique offre cependant un point de chute aux ex-candidats - Nathalie Kosciusko-Morizet, Jean-Frédéric Poisson, Jean-François Copé - ou à leurs proches - la juppéiste Virginie Calmels, le sarkozyste François Baroin et Thierry Solère, qui soutenait Bruno Le Maire durant la campagne.

"Nous ne sommes pas en train de créer une nouvelle armée mexicaine. Nous faisons dans l'efficacité et le rassemblement", a soutenu Jérôme Chartier.

François Fillon continue par ailleurs à peaufiner la composition de son équipe de campagne, où Eric Woerth, venu de la Sarkozie, et Bruno Le Maire, qui l'avait rallié dès le soir du premier tour, devraient se faire une place.

"FAIRE BLOC"

Quelques heures plus tôt, l'ex-Premier ministre a exhorté les députés LR, toutes tendances confondues, à se ranger derrière lui.

"Quel que fut votre vote dans ces primaires, mon adage est simple : on est maintenant tous ensemble. Je vais aller au front et je vous demande de faire bloc", a-t-il lancé lors de la réunion hebdomadaire du groupe à l'Assemblée.

"J'aurai soin de faire les choses avec efficacité et amitié car tout le monde sera utile dans les mois et les années à venir", a-t-il ajouté.

Au cours de cette même réunion, l'ex-sarkozyste Christian Jacob, chef de file des députés LR, Jean-François Copé, avec qui François Fillon était entré en guerre en 2012, et Laurent Wauquiez ont fait serment d'allégeance au nouveau chef de l'opposition, selon des participants.

"François Fillon a trouvé les mots (...) pour donner la dynamique de la préparation de la campagne présidentielle, parce que maintenant c'est cap sur l'Elysée. Le rassemblement s'est fait immédiatement", a déclaré François Baroin, ancien soutien de Nicolas Sarkozy, à l'issue de ce conclave.

Mais plusieurs députés se sont dits "étonnés", voire "heurtés" par "la sécheresse" des propos de François Fillon, qui s'est présenté comme seul maître à bord.

La fermeté de celui que Nicolas Sarkozy tenait pour un simple "collaborateur" n'enchante pas tous les soutiens des candidats défaits à la primaire, en particulier les orphelins d'Alain Juppé qui n'approuvent pas le projet dans son ensemble.

"S'il refuse d'amender le programme, on prépare l'échec de la droite", a dit à Reuters un proche du maire de Bordeaux.

"Le programme Fillon c'est 'too much', le pays n'en a pas besoin, pas besoin d'à la fois travailler plus et sabrer dans la protection sociale", ajoute cet élu, pour qui le positionnement libéral de François Fillon est une aubaine pour le Front national.

De retour à Bordeaux mardi après son échec au second tour de la primaire (33,5%), Alain Juppé lui-même a lancé cette mise en garde : "Nous ne gagnerons pas sans les idées que j'ai portées et qui pèsent quand même un tiers de la droite et du centre."

Après la droite, le centre : maintenant qu'il a repris le parti à sa main, le candidat à la présidentielle tâchera de souder les centristes autour de lui pour éviter autant que possible une multiplication des candidatures.

Selon Jérôme Chartier, François Fillon doit rencontrer ce mercredi le président de l'UDI, Jean-Christophe Lagarde, favorable à l'ouverture de discussions préalables à un ralliement, et se dit prêt à rencontrer le président du MoDem, François Bayrou, si celui-ci en fait la demande. (Avec Jean-Baptiste Vey et Emmanuel Jarry, édité par Sophie Louet)