WASHINGTON, 16 avril (Reuters) - Extraits de l'interview de l'ancien directeur du FBI, James Comey, limogé par Donald Trump, que la chaîne ABC News a diffusée dans son intégralité dimanche soir.

L'ex-patron du FBI dont le renvoi avait provoqué une tempête politique à Washington est revenu au centre de l'actualité américaine depuis la publication, la semaine passée, d'extraits de ses mémoires à paraître mardi.

Dans "A Higher Loyalty, Truth, Lies and Leadership" ("Mensonges et vérités: Une loyauté à toute épreuve" dans sa version française), Comey compare notamment le président américain à un chef de clan mafieux.

TRUMP EST "MORALEMENT INAPTE" À PRÉSIDER

"Je n'accorde aucun crédit à la thèse selon laquelle il serait mentalement incompétent ou aux premiers stade de la démence. Ce qui me frappe chez lui, c'est que c'est une personne à l'intelligence supérieure à la moyenne qui suit les conversations et sait ce qu'il se passe.

"Je ne pense pas qu'il soit médicalement inapte à être président, je pense qu'il est moralement inapte à être président.

"Une personne qui voit des équivalences morales à Charlottesville, qui parle des femmes et les traite comme si elles étaient un morceau de viande, qui ment constamment sur des sujets majeurs ou mineurs et affirme que le peuple américain le croit, cette personne-là n'est pas apte, sur des bases morales, à être président des Etats-Unis. Et ce n'est pas une déclaration politique", dit-il encore.

SUR LA "LOYAUTÉ"

Comey explique que le titre de son livre lui a été inspirée par une "conversation bizarre" qu'il a eue avec Trump à la Maison blanche en janvier 2017, quelques jours après l'investiture du 45e président des Etats-Unis.

"Il a demandé ma loyauté personnelle, en tant que directeur du FBI. Ma loyauté est supposée aller au peuple et aux institutions américaines."

SUR UNE ÉVENTUELLE PROCÉDURE DE DESTITUTION

"Destituer Donald Trump et le révoquer de sa fonction, ce serait déresponsabiliser les Américains et faire se produire indirectement une chose dont je pense qu'il ont le devoir de faire directement. Les habitants de ce pays doivent se lever et aller dans les bureaux de vote."

SUR UNE POSSIBLE OBSTRUCTION À LA JUSTICE

(dans une déposition remise en juin 2017 à la commission du Renseignement du Sénat, Comey évoque une réunion en date du 14 février 2017 au cours de laquelle, dit-il, Trump lui demande de "laisser tomber" avec Michael Flynn, son éphémère conseiller à la sécurité nationale qui a démissionné la veille en raison de ses mensonges sur ses discussions avec l'ambassadeur russe en poste à Washington. "Je n'ai pas compris que le président parlait plus largement de l'enquête sur la Russie ou de possibles liens avec sa campagne. J'ai pu me tromper (...)", écrit Comey dans sa déposition. Trump a démenti.)

"Est-ce que le président Trump faisait obstruction à la justice ?, lui demande l'intervieweur d'ABC, George Stephanopoulos.

- Possiblement, je veux dire qu'il y a à l'évidence des signes d'obstruction à la justice. Cela dépendrait - et je ne suis qu'un témoin dans cette affaire, pas un enquêteur, ni un procureur -, cela dépendrait d'autres choses qui reflétaient ses intentions."

SUR L'AFFAIRE DES COURRIELS D'HILLARY CLINTON

(A onze jours de l'élection présidentielle du 8 novembre 2016, le FBI dirigé par Comey a rouvert une enquête sur l'utilisation par la candidate démocrate d'un serveur de messagerie privé lorsqu'elle dirigeait la diplomatie américaine sous le premier mandat de Barack Obama - Clinton est convaincue que cette initiative a contribué à sa défaite)

"Je ne me souviens pas d'y avoir pensé consciemment, mais c'est peut-être parce que je raisonnais par rapport à un monde dans lequel Hillary Clinton allait battre Donald Trump et je suis donc certain que c'était un facteur (qui l'a conduit à rouvrir l'enquête NDLR).

"Je ne me souviens pas de l'avoir exprimé mais (...) elle allait être élue présidente et si j'avais caché cela au peuple américain, elle aurait été privée de légitimité au moment où elle aurait été élue, au moment où cela serait sorti."

SUR SON LIMOGEAGE, LE 9 MAI 2017

"J'ai pensé: 'C'est une folie de me congédier.' Je dirige l'enquête sur une influence russe et en particulier sur le point de savoir si qui que ce soit dans l'orbite de Trump s'est coordonné et a conspiré avec les Russes. Cela n'a absolument aucun sens. Et les raisons qu'ils m'ont données (ndlr, sa gestion de l'affaire des courriels de Clinton) sont à l'évidence un prétexte."

(Nicolas Delame et Henri-Pierre André pour le service français)