Genève (awp) - Après à peine un peu plus de trois ans passés à ce poste, le banquier Boris Collardi va quitter le collège des associés de Pictet. Cette annonce surprise n'est pas liée au blâme de la Finma qu'avait reçu l'ex-patron de Julius Bär dans un ancien dossier de blanchiment d'argent.

L'arrivée en juin 2018 de l'ex-patron de Julius Bär chez Pictet avait suscité l'émoi dans le secteur financier. La nomination du banquier vaudois d'origine, réputé et médiatique, représentait alors un gros coup pour la banque privée mais également pour l'ensemble de la place financière genevoise.

Boris Collardi a été le 42e associé de l'histoire de Pictet - fondé en 1805 - et le plus jeune membre du collège. Mais alors que la durée d'engagement d'un associé chez Pictet est en moyenne de 20 et 25 ans, la banque a annoncé mercredi que M. Collardi a décidé de se retirer du collège des associés et de quitter le groupe au 1er septembre.

"Après mûre réflexion et des discussions avec le collège des associés, Boris Collardi a décidé de se retirer de ses fonctions d'associé et de quitter Pictet", a indiqué la banque dans un communiqué, sans préciser les raisons ayant conduit à cette décision.

"Pictet Wealth Management est dans une excellente position pour assurer son succès à long terme et je suis convaincu que le groupe continuera à progresser", a souligné Boris Collardi, cité dans le communiqué.

Elif Aktug et François Pictet rejoindront le collège des associés le 1er septembre, sous réserve de l'approbation des autorités de surveillance. Mme Aktug est la première femme dans l'histoire de Pictet à accéder à ces fonctions.

Le communiqué n'a fait aucune mention des prochains objectifs professionnels de M. Collardi.

En janvier dernier, le banquier avait écopé d'un blâme de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Finma) pour une affaire de blanchiment d'argent remontant à la période où il dirigeait le gestionnaire de fortune Julius Bär. La banque genevoise lui avait alors renouvelé sa confiance.

Le gendarme des marchés avait reproché à Julius Bär de graves manquements dans la lutte contre le blanchiment d'argent. Les griefs étaient liés à de potentiels actes de corruption autour de la compagnie étatique vénézuélienne Petróleos de Venezuela (PDVSA) et de la Fédération internationale de football association (Fifa) entre 2009 et 2018, période pendant laquelle Boris Collardi était à la tête du groupe zurichois.

Contacté par AWP, un porte-parole de Pictet a souligné que le départ de M. Collardi n'était "aucunement lié au blâme de la Finma" et qu'il s'agissait d'une décision personnelle.

Le gendarme des marchés financiers a pour sa part indiqué avoir été informé de ce départ, sans pour autant commenter cette information.

La banque a déjà connu des mandats d'associés moins longs que la moyenne de 20 ans, avec notamment les départs anticipés de Fabien Pictet - qui avait siégé au collège des associés de 1991 à 1997 - et de Jean-François Demole (1998 à 2015).

"Meilleurs résultats de l'histoire"

Parallèlement à l'annonce surprise de ce départ, Pictet a dévoilé sa performance financière. Sur les six premiers mois de l'année, Pictet a dégagé "les meilleurs résultats semestriels de l'histoire" de la banque, a assuré l'associé senior Renaud de Planta, soulignant que "les clients nous ont confié des avoirs nets records".

Les actifs sous gestion ou en dépôt ont en effet progressé à 690 milliards de francs suisses fin juin, contre 609 milliards au bouclement de 2020.

Au niveau opérationnel, le produit d'exploitation a bondi de 16% sur un an à 1,5 milliard de francs suisses, alors que les charges avant impôts ont enflé de 7% à 1,1 milliard. Le bénéfice net consolidé a pour sa part plus que doublé (+142%) à 636 millions, selon des résultats non audités.

Le résultat net comprend un gain extraordinaire issu de la transaction de "sale and lease back" que Pictet a réalisée au premier trimestre concernant son bâtiment principal à Genève. Le produit de cette transaction permettra à Pictet d'autofinancer l'expansion de son siège avec la construction d'un ensemble d'immeubles à Genève d'ici 2025.

Le résultat opérationnel, qui exclut ce gain unique, a atteint 464 millions de francs suisses, en forte hausse de 45% comparé au premier semestre 2020.

al/buc