ANKARA, 12 mai (Reuters) - Le président iranien Hassan Rohani, qui briguera un second mandat le 19 mai, a présenté vendredi ses adversaires comme des pions avides de pouvoir entre les mains des forces de sécurité lors d'un débat télévisé qui est allé bien au-delà des confrontations électorales classiques en Iran.

A une semaine du scrutin, le président sortant, élu triomphalement il y a quatre ans sur la promesse de rompre avec l'isolement international de l'Iran, affrontera vendredi prochain cinq adversaires, dont Ebrahim Raisi, porté par les conservateurs et soutenu par l'ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême de la Révolution, et Mohammad Baqer Qalibaf, l'actuel maire de Téhéran.

La stagnation économique et la lenteur des réformes sociales pèsent sur son bilan, tandis que l'accord sur le nucléaire iranien conclu en juillet 2015 avec les six puissances du P5+1 (Chine, Etats-Unis, Russie, France, Grande-Bretagne + Allemagne) est sa grande réalisation diplomatique.

Au cours des trois heures de débat, Rohani s'en est pris à des cibles longtemps considérées comme intouchables, y compris l'institution judiciaire et les Pasdaran, le corps militaire d'élite des Gardiens de la révolution qui contrôle l'essentiel de l'économie nationale.

"M. Raisi, vous pouvez me diffamer comme bon vous semble. En tant que juge d'un tribunal religieux, vous pouvez même délivrer un mandat d'arrêt. Mais de grâce, n'abusez pas de la religion pour le pouvoir", a-t-il lancé à celui qui apparaît comme son principal adversaire.

"Certains groupes révolutionnaires et de sécurité transportent des gens par car pour vos meetings de campagne. Qui les finance ?", l'a-t-il interpellé.

Rohani a par ailleurs accusé Mohammad Baqer Qalibaf, ancien commandant des Gardiens de la révolution et ex-chef de la police, d'être un voyou s'étant vanté d'avoir personnellement défié de jeunes manifestants.

En face, Raisi et Qalibaf ont insisté sur le bilan économique du président sortant, mettant en avant les chiffres du chômage et de l'inflation.

"Le chômage est haut. Le pouvoir d'achat des gens a dramatiquement chuté", a attaqué Raisi.

Mais même sur ce thème, Rohani a contre-attaqué par une attaque voilée contre les Pasdaran: "Si nous voulons améliorer l'économie, nous ne devrions pas laisser des groupes avec un appui sécuritaire et politique s'impliquer dans l'économie", a-t-il dit.

La principale inquiétude du président sortant porte sur le risque d'abstention d'une partie des électeurs qui l'ont élu en 2013 dès le premier tour mais seraient aujourd'hui gagnés par la désillusion.

Si aucun candidat ne remporte plus de 50% des voix le 19 mai, un second tour aura lieu une semaine plus tard. (Parisa Hafezi; Henri-Pierre André pour le service français)