New York (awp/afp) - Wall Street évoluait jeudi vers des records deux jours après l'élection de Donald Trump à la présidence américaine, s'attachant aux aspects positifs du programme d'un candidat dont elle redoutait pourtant la victoire depuis plusieurs mois.

"La performance de la Bourse est aussi stupéfiante que les résultats des élections", a reconnu dans une note Patrick O'Hare, de Briefing.

A la mi-séance jeudi, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average évoluait à des niveaux jamais vus, se maintenant dans le vert autour de 18.700 points, ce qui laissait penser que la nette hausse observée la veille par Wall Street n'était pas un feu de paille.

Le Nasdaq se repliait nettement, mais il était sujet à des considérations particulières au secteur technologique, qui n'a guère à gagner d'une présidence Trump.

Rien ne laissait attendre une telle embellie en cas de victoire de M. Trump: pendant toute la campagne présidentielle, Wall Street avait baissé chaque fois que l'actualité se montrait favorable au candidat républicain, jugé bien plus imprévisible que son adversaire démocrate, Hillary Clinton.

"L'idée derrière la hausse des marchés, c'est ce que l'on connaît du programme économique, non seulement de Donald Trump mais aussi des républicains: tous les axes principaux sont favorables pour le marché", a avancé Gregori Volokhine, de Meeschaert. "Si les marchés n'avaient pas anticipé cela, c'est parce qu'ils n'avaient pas du tout anticipé une victoire de M. Trump".

Alors que les analystes mettaient depuis des mois en avant les risques représentés par le protectionnisme de M. Trump, d'ailleurs bien loin de la ligne habituelle du parti républicain, l'attention se porte désormais sur les ambitions affichées par le futur président en matière de relance économique, notamment par le biais des infrastructures.

"Pour le moment, ce que voit le marché, ce n'est que les côtés positifs de mesures qui vont stimuler l'économie", a rapporté M. Volokhine, évoquant aussi les vastes baisses d'impôts promises par le républicain. "Le marché n'anticipe absolument pas tous les côtés négatifs, populistes des déclarations de Trump... A tort ou raison, c'est impossible à dire".

Les analystes remarquaient aussi que M. Trump peut espérer avoir les coudées franches car son parti va garder le contrôle du Congrès, même s'il n'est pas dit que les élus entérinent automatiquement une accélération des dépenses publiques, là encore contraire à l'orthodoxie républicaine.

Sur ce plan, certains observateurs commençaient aussi à mettre en garde sur le durcissement monétaire que la Réserve fédérale (Fed) pourrait adopter en cas de fort interventionnisme budgétaire.

Les incertitudes liées à une présidence Trump ont d'abord donné du crédit à l'idée que la banque centrale pourrait attendre au lieu de relever ses taux en décembre comme ce qui est largement attendu, mais la Fed pourrait à plus long terme être conduite à resserrer sa politique car un plan de relance représente des risques d'inflation.

Cela "pourrait pousser la Fed à relever ses taux de façon plus marquée, plus fréquente et même à plus brève échéance, si la relance fait flamber la demande par rapport à l'offre", écrit Jim O'Sullivan, de HFE.

Sur la place américaine, cette perspective semblait non seulement se traduire par un bond du secteur financier, qui profiterait de taux plus élevés, mais surtout par un effondrement du marché obligataire, qui a, lui, tendance à profiter d'une faible inflation.

Reste qu'à son tour, "la très mauvaise performance du marché obligataire a pour conséquence la bonne disposition de la Bourse", car les investisseurs achètent des actions au détriment des obligations, a avancé M. O'Hare. "La Bourse profite de la perspective d'une croissance plus élevée et d'une inflation plus marquée, alors que ce n'est certainement pas le cas du marché de la dette".

En tout état de cause, la bonne performance de Wall Street "a réduit à néant les idées reçues et alimente l'idée très réconfortante d'une flambée de fin d'année, dans l'idée que des fonds vont rattraper leur retard en se débarrassant de valeurs refuges comme la dette américaine pour retrouver leur place à la Bourse", a-t-il conclu.

afp/jh