PARIS (Reuters) - Le premier syndicat d'enseignants des écoles primaires en France a lancé vendredi un appel à la grève pour le jeudi 13 janvier, dénonçant une "pagaille indescriptible" dans les écoles soumises à un protocole sanitaire en constante évolution et pratiquement inapplicable pour endiguer l'épidémie de COVID-19.

Le gouvernement français s'est refusé à repousser la rentrée scolaire intervenue le 3 janvier, comme le réclamaient certains professionnels, alors que le pays est en pleine "vague Omicron", avec une moyenne mobile sur sept jours de plus de 200.000 nouveaux cas de contamination.

Pour maintenir les écoles ouvertes, le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, a dévoilé dimanche dernier un nouveau protocole s'appliquant dès le lundi matin, qui stipulait notamment qu'en présence d'un cas de coronavirus dans une classe, celle-ci ne fermerait plus. Tous les cas contacts devraient en revanche se tester à trois reprises en cinq jours et s'isoler uniquement si l'un des tests est positif.

Cet "assouplissement" n'a pas empêché la fermeture de plus de 9.000 classes depuis la rentrée (sur un total de 527.000), un chiffre plus atteint depuis le printemps dernier, selon les chiffres du ministère, et a provoqué un casse-tête pour les enfants et les enseignants qui doivent se faire tester, en raison des files d'attente devant les pharmacies et de la pénurie d'autotests.

Face à la grogne qui montait, le ministère a modifié une nouvelle fois son protocole jeudi, en n'exigeant plus désormais le cycle de trois tests qu'après un premier cas positif et dans l'hypothèse où un autre cas est détecté sept jours après le premier, et non à chaque nouveau cas dans l'intervalle.

"Bien sûr que c'est dur, bien sûr que c'est compliqué", a concédé Jean-Michel Blanquer vendredi matin sur la chaîne CNEWS, tout en considérant que les tests sont le prix à payer pour maintenir les écoles ouvertes.

"ON EST COMPLÈTEMENT DÉBORDÉ"

"La solution de facilité, c'est de dire : les enfants ne vont plus à l'école. C'est ce qui s'est passé dans de nombreux pays, c'est ce que proposent certains responsables politiques. Ce n'est pas ce que je propose", a ajouté le ministre.

Loin de convaincre les enseignants, qui s'estiment "méprisés", les propos de Jean-Michel Blanquer semblent avoir attisé la colère de leurs syndicats.

Dans un communiqué diffusé vendredi, le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, "appelle donc les personnels des écoles à se mettre en grève le jeudi 13 janvier, face au chaos mais également au mépris et aux mensonges, pour obtenir les conditions d'une école sécurisée sous Omicron".

Déplorant "une pagaille indescriptible et un sentiment fort d'abandon et de colère parmi les personnels", le syndicat exige "le retour à la règle protectrice 'un cas positif = fermeture de la classe', l'isolement des cas contacts intrafamiliaux et une politique de tests préventifs hebdomadaires salivaires systématiques".

Dans de nombreuses écoles, les responsables jugent la situation intenable. C'est le cas au collège Jean Renoir de Boulogne-Billancourt, au sud-ouest de Paris, où une cinquantaine d'élèves sur 620 et un enseignant sur quatre ont été testés positifs depuis la rentrée.

"Ça a été très, très, très difficile parce qu'on a vu une multiplication des cas, à un rythme auquel on n'était pas du tout habitué", souligne le directeur de l'école, Aristide Adeilkalam. "Avant on arrivait à traiter les cas au fur et à mesure qu'ils apparaissaient, aujourd'hui on est complètement débordé."

Face à cette situation dégradée, le Snuipp-FSU estime que "les directeurs, directrices et les enseignants, enseignantes ne peuvent plus exercer correctement leurs missions" et invite les syndicats à rejoindre son mouvement de protestation et les enseignants à se déclarer en grève d'ici à lundi soir. Une réunion de l'intersyndicale de l'enseignement était prévue vendredi en fin d'après-midi.

(Ecrit par Tangi Salaün, avec Yiming Woo à Boulogne, édité par Sophie Louet)