Le Brésil doit rapidement réformer son administration et son fisc, avance Thierry Larose, gérant chez Vontobel. Lula s'efforcera sans doute de réduire les inégalités, de stimuler les investissements dans l'éducation et les infrastructures, de remettre l'environnement à l'ordre du jour, notamment en stoppant la déforestation de l'Amazonie, et de rétablir le rôle du pays au niveau international. À l'inverse, Bolsonaro continuera de réduire le rôle de l'État dans l'économie et de faciliter les affaires, tout en essayant de rétablir une discipline fiscale mise à mal par la campagne électorale.

Dans l'ensemble, la situation n'est pas trop alarmante, mais le real brésilien n'est pas particulièrement bon marché et les perspectives optimistes qui ont prévalu récemment soulèvent un certain scepticisme. Le plan de la duration semble plus optimiste, les taux pouvant se comprimer à l'approche du début du cycle d'assouplissement de la politique monétaire.

Quant à la viabilité de la dette, après avoir sensiblement diminué l'an dernier grâce à la forte croissance du PIB nominal, la dette brute sur PIB devrait reprendre sa progression en 2023. La dette nette souffrira de l'effet négatif de la hausse des taux du dollar sur les réserves de change. En outre, le coût du service de la dette publique reste assez élevé (près de 25 % des recettes publiques), car plus de 70 % de l'encours de la dette est indexé sur le taux de la politique monétaire (via les Letras Financeiras do Tesouro) ou sur l'inflation (via les Notas do Tesouro Nacional - Série B/C). Il y a donc peu de place pour l'euphorie de ce côté-là.

La privatisation des entreprises publiques, ainsi que la mise aux enchères des licences d'exploitation des infrastructures publiques, constituent l'un des objectifs principaux de Paulo Guedes, ministre de l'Economie, et le resteront si Bolsonaro remporte un second mandat.

C'est la seule carte qu'il peut jouer pour réduire le poids de la dette publique, face aux taux d'intérêt réels plus élevés que la croissance du PIB réel et face au problème majeur du maintien d'un excédent budgétaire primaire l'année prochaine.

Par ailleurs, les privatisations à grande échelle se heurtent à de nombreux obstacles judiciaires et politiques et prennent beaucoup de temps à se concrétiser.

La privatisation de Petrobras prendrait non seulement plus de temps qu'un mandat présidentiel, mais se heurterait également à un refus de Bolsonaro lui-même, dont le programme populiste implique un interventionnisme constant et actif dans la politique de prix de l'entreprise.

A contrario, une présidence de Lula mettrait certainement fin aux privatisations des entreprises publiques, mais il ne semble pas pour autant que les renationalisations soient au programme.