(Actualisé avec incertitude sur l'issue de la procédure de destitution)

BRASILIA, 7 juin (Reuters) - Le procureur général du Brésil a demandé à la Cour suprême d'autoriser l'arrestation du président du Sénat et du président du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB), la formation du chef de l'Etat par intérim, pour tentative d'obstruction à la justice, rapporte mardi le quotidien O Globo.

Outre le président du Sénat Renan Calheiros et le dirigeant du PMDB Romero Jucá, le magistrat veut aussi obtenir l'autorisation d'arrêter Eduardo Cunha, président suspendu de la Chambre des députés, et José Sarney, ex-président du Brésil (1985-1990) et sénateur jusqu'en 2014.

Le procureur Rodrigo Janot les soupçonne d'avoir tenté de stopper l'enquête en cours depuis deux ans sur un système de corruption autour de la compagnie pétrolière Petrobras .

Tous quatre se sont défendus d'avoir cherché à nuire à l'enquête sur l'opération "Lavage express" ("Operação Lava Jato"), qui a mis au jour des mécanismes de surfacturations et de commissions occultes autour de Petrobras mettant en cause plusieurs dizaines de cadres d'entreprises et de responsables politiques.

Dans un communiqué publié après les révélations d'O Globo, le sénateur Calheiros a réaffirmé qu'il n'avait jamais tenté de faire obstruction à l'enquête. Romero Jucá a dénoncé de son côté une demande "absurde".

LUEUR D'ESPOIR POUR ROUSSEFF

Leur arrestation pourrait affaiblir encore le gouvernement intérimaire de Michel Temer. L'ex-vice-président a succédé le mois dernier à Dilma Rousseff, écartée du pouvoir le temps que le Sénat instruise son procès en destitution pour avoir manipulé les comptes publics.

Son gouvernement a déjà perdu deux ministres, impliqués dans le scandale, et le ministre du Tourisme est à son tour visé.

Si en plus d'être arrêté, Renan Calheiros était, ainsi que le réclame également le procureur Janot, relevé de la présidence du Sénat, le poste reviendrait à un allié de Dilma Rousseff, le sénateur Jorge Viana.

Sur les 55 sénateurs qui se sont prononcés le mois dernier pour la mise en accusation de la présidente, une douzaine sont désormais indécis, selon la presse brésilienne, or 54 voix, soit la majorité des deux tiers, sont nécessaires pour sa destitution. L'issue de la procédure pourrait donc dépendre d'un ou deux élus.

Si elle échoue, Dilma Rousseff pourra théoriquement achever son mandat, qui court jusqu'en 2018, mais de nombreux Brésiliens la jugent trop affaiblie pour reprendre ses fonctions et pensent qu'elle sera contrainte de convoquer des élections anticipées.

"Cela va être très serré. Je n'ai rien décidé", a déclaré à Reuters le sénateur Cristovam Buarque, selon lequel six ou sept de ses collègues sont également indécis.

"La destitution est devenue une élection entre Rousseff et Temer (...) La présidence dépendra de trois ou quatre voix", a-t-il ajouté.

La procédure pourrait s'étaler jusqu'au 16 août. Les partisans de Temer ont tenté sans succès lundi d'avancer la date du verdict à la fin juillet, de façon à ce que le président puisse annoncer le 5 août l'ouverture des Jeux olympiques de Rio en toute légitimité. (Silvio Cascione; Henri-Pierre André et Jean-Philippe Lefief pour le service français)