Alors que les Etats-Unis et le Japon sont déjà passés par la perte de leur note "triple A", la France et l'Autriche devraient pouvoir se remettre de cette déconvenue. Mais le vent d'optimisme qui a soufflé jeudi sur le marché après une adjudication de dette espagnole très réussie semble déjà un lointain souvenir.

"La crise de la zone euro domine à nouveau l'activité du marché, après une période où des signes d'amélioration de l'économie aux Etats-Unis et d'assouplissement de la politique monétaire en Chine avaient permis aux marchés de progresser", relève Domici Rossi, de Fidelity Worldwide Investment.

Standard & Poor's a déclassé vendredi soir les notes de crédit de neuf pays de la zone euro, une décision qui risque d'accentuer les difficultés des pays utilisant la monnaie unique dans la mesure où elle risque d'accroître les coûts de financement sur les marchés d'un certain nombre d'Etats.

Les Bourses européennes ont ouvert en nette baisse lundi, le CAC 40 cédant 0,5% à 3.180,40 points tandis que l'indice paneuropéen Eurostoxx 50 perdait 0,48%.

L'euro, lui, reste proche d'un plus bas de 17 mois face au dollar, et a même touché un niveau inédit depuis 11 ans contre le yen.

Les investisseurs s'inquiètent notamment des conséquences de la décision de S&P sur le Fonds européen de stabilité financière (FESF), le fonds de secours de la zone euro, qui pourrait ne conserver sa note maximale qu'au prix d'une augmentation des garanties des pays encore notés "AAA" ou bien d'une réduction de sa capacité de prêt.

Wolfgang Schäuble a assuré lundi matin que les 211 milliards d'euros de garanties allemandes pour le FESF étaient suffisantes.

"C'est suffisant. Les chefs d'Etat et de gouvernement ont décidé (...) que le Mécanisme européen de stabilité (MES), fonds permanent, succéderait au FESF dès cette année", a-t-il dit au micro de la radio allemande Deutschlandfunk.

"Pour le travail qui incombe au FESF dans les mois à venir, la somme des garanties est largement suffisante."

LA BCE VISE L'APAISEMENT, DIT NOWOTNY

Concernant les négociations entre la Grèce et ses créanciers, qui ont été interrompues vendredi et doivent reprendre mercredi, le ministre allemand des Finances a jugé que le secteur privé ne devrait pas mettre en péril l'objectif de viabilité de la dette avec des exigences trop élevées en termes d'intérêt.

Son homologue des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a dit dimanche lors d'une visite à Athènes que l'Allemagne était optimiste sur l'issue des discussions.

"Les discussions sont difficiles mais avec de la bonne foi, elles déboucheront sur un bon résultat", a-t-il assuré.

Athènes discute depuis des mois avec ses créanciers privés d'un échange de dette, condition essentielle à la mise en place d'un deuxième plan d'aide de 130 milliards d'euros des bailleurs de fonds internationaux de la Grèce, sans lequel le pays risque de faire défaut autour du 20 mars.

"A ce stade, il y a un risque croissant que la restructuration (de la dette grecque) soit coercitive plutôt que volontaire, même si cette dernière option reste notre scénario de base, souligne Joachim Fels, économiste de Morgan Stanley.

Dans ce contexte lourd d'incertitudes, l'appétit des investisseurs pour les adjudications de dette en Europe risque d'être scruté à la loupe. Ainsi, la France doit émettre lundi après-midi jusqu'à huit milliards d'euros de bons du Trésor à court terme.

Le rendement des obligations françaises à 10 ans s'est tendu de 3 points de base (pdb) à 3,12%, tandis que ceux des titres espagnols et italiens de même échéance grimpaient respectivement de 11 pdb à 5,35% et de 14 pdb à 6,80%.

Ewald Nowotny, membre du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE), a dit dimanche que l'institution de Francfort ferait tout pour calmer les marchés après les abaissements de notes.

"Du côté de la Banque centrale européenne, nous ferons tout notre possible pour provoquer un apaisement (de la situation)", a dit à la télévision autrichienne le gouverneur de la Banque nationale d'Autriche.

Annika Breidthardt, Jean Décotte pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten

par Mike Peacock