par Ben Hirschler et Lisa Jucca

Moins d'une semaine après le discours du président américain Barack Obama sur sa volonté de mettre au pas les grandes banques, et alors que plusieurs pays s'apprêtent à taxer les bonus des banquiers, nombre des 2.500 participants à ce sommet semblent partager cette inquiétude.

Des enquêtes réalisées pour la conférence montrent toutefois une amélioration de la confiance dans les perspectives économiques.

Selon une étude du cabinet de conseil PricewaterhouseCoopers réalisée auprès de 1.200 dirigeants d'entreprise dans 52 pays, 39% des patrons de l'industrie prévoient d'augmenter leurs recrutements en 2010 tandis que 25% prévoient de supprimer des postes, alors que ces derniers étaient près de 50% l'an dernier.

Mais le nombre des recrutements restera limité, et concentré sur les pays émergents, comme la Chine et l'Inde, précise l'étude.

La menace d'interventions politiques et réglementaires non-coordonnées dans l'économie constitue le principal risque pour de nombreux dirigeants de sociétés. S'y ajoutent les incertitudes sur la croissance chinoise et les problèmes liés à la dette publique, en Grèce et ailleurs.

Le discours de Barack Obama le 21 janvier sur sa volonté de forcer les grands groupes bancaires à rompre leurs liens avec les "hedge funds" et les fonds de capital-investissement ainsi qu'à cesser leurs activités de trading pour compte propre, a suscité de vives réactions dans le secteur et fait reculer depuis les cours des valeurs bancaires.

DÉNONCIATION DU "GRAND ÉGALE MAUVAIS"

Le président du groupe britannique Barclays, Bob Diamond, s'en est pris mercredi à Davos à la volonté du locataire de la Maison blanche de limiter la taille des banques.

"Je n'ai connaissance d'aucun élément suggérant que le fait de rendre toutes les banques plus petites ou plus étroites, était 'la' réponse", a-t-il dit, dénonçant la tentation d'une marche arrière consistant à affirmer que "grand = mauvais".

Le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, a quant à lui minimisé les divergences sur le dossier de la régulation entre les deux rives de l'Atlantique.

Dans un entretien publié mercredi par le Wall Street Journal, il a estimé que les réformes prévues aux Etats-Unis étaient "pertinentes et intéressantes", ajoutant qu'elles visaient des objectifs communs à celles de décisions européennes.

Tous les banquiers ne se montrent pas forcément critiques à l'encontre du projet de Barack Obama: Corrado Passera, l'administrateur délégué du groupe italien Intesa Sanpaolo, a jugé bonne l'idée de récompenser les banques qui réduiraient leurs activités de trading pour compte propre pour favoriser le crédit à l'économie réelle.

Le président français, Nicolas Sarkozy, devait prononcer dans l'après-midi à Davos le discours inaugural du Forum, dont la régulation du capitalisme pourrait être l'un des principaux thèmes.

Anticipant peut-être des critiques du chef de l'Etat français, Jacob Frankel, le président de JPMorgan Chase International, a souligné le danger du passage d'une dérégulation peut-être excessive à une régulation extrême.

"Nous sommes en train de tomber dans le piège d'un excès d'interventionnisme, d'un excès de protectionnisme", a-t-il dit.

Pour sa part, l'économiste américain Nouriel Roubini, réputé pour avoir prédit l'imminence de la crise financière de 2008, a mis en avant le risque de voir la politique monétaire très accommodante de la Réserve fédérale américaine alimenter des bulles dont l'éclatement pourrait déclencher la prochaine crise.

"On en arrive à faire trop, trop vite et trop tôt, et la politique monétaire américaine est en train d'être exportée dans le reste du monde", a-t-il dit.

Les P-DG de plusieurs des banques les plus connues du monde et les plus emblématiques de la crise, comme Goldman Sachs ou JPMorgan Chase & Co, ont fait le choix de ne pas venir à Davos cette année. Mais ceux de deux des groupes renfloués par Washington, Citigroup et Bank of America, sont attendus dans la station suisse.

Avec la contribution de Krista Hughes, Natsujo Waki, Clara Ferreira Marques, Martin Howell et Paul Taylor, version française Marc Angrand, édité par Jean-Michel Bélot