Après une embellie en 2010, le marché français est reparti à la baisse en 2011, accusant un repli de 1,5% pour totaliser 2,6 milliards d'euros, selon les chiffres provisoires diffusés jeudi par l'Institut français de la mode (IFM).

Le chiffre d'affaires du secteur en France a baissé tant en volume qu'en valeur, malgré la hausse des pris du coton et des coûts salariaux en Asie, en raison du poids prépondérant de la grande distribution et des chaîne spécialisées (Etam, Darjeeling) dans les ventes de soutien-gorge, culottes et autres nuisettes.

Les super et hypermarchés ainsi que les chaînes spécialisées réalisent à eux seuls 41% des ventes de lingerie.

"Les soutien-gorge vendus sous les marques de distributeurs oscillent entre 15 et 20 euros, tandis que ceux des marques de lingerie valent de 60 à 100 euros", a précisé à Reuters Cécile Vivier, directrice du Salon international de la lingerie, qui se tiendra à Paris du 21 au 23 janvier.

Par ailleurs, les détaillants multimarques, qui comptent pour seulement 11,3% du marché, sont aujourd'hui nettement devancés par la vente en ligne (13%).

"Internet a été une vraie déferlante", a ajouté Cécile Vivier. Car le commerce en ligne permet la confidentialité et les tailles ont été largement standardisées, facilitant les achats à distance.

UNE "NÉO-GAINE" GLAMOUR

Malgré la morosité ambiante et les effets anxiogènes de la crise, l'exception hexagonale demeure : les Françaises consacrent une part importante (18% à 20%) de leurs dépenses d'habillement à leurs sous-vêtements, pour lesquels elles ont dépensé en moyenne 97,4 euros l'an dernier (après 99 euros en 2010), contre seulement 79 euros en moyenne en Europe.

Pour dynamiser le marché et développer leurs ventes, les marques élargissent leur offre aux plaids, parures de lit, linge de bain, qu'elles souhaitent positionner davantage sur le haut de gamme. "Il s'agit d'un des thèmes forts du salon qui va y consacrer 26% de son offre", a précisé Cécile Vivier.

Côté tendances, la saison prochaine sera marquée par le grand retour de la gaine. Produit phare, la "néo-gaine" conservera ses vertus sculptantes, mais en version glamour, dans des matières ultra-souples aux effets de "seconde peau".

Sexy, elle doit sublimer les formes sans pour autant enfermer les femmes.

"La gaine, avec son côté enveloppant et son retour en arrière, peut être interprétée comme le signe d'un malaise dans l'époque présente (...) Un repli nostalgique vers un cocon protecteur", relève Frédéric Monneyron, sociologue de la mode.

DÉLOCALISATIONS

La corseterie française a largement délocalisé sa production à l'étranger, au Maghreb ou en Europe de l'Est, et très rares sont les acteurs qui produisent encore entièrement en France.

Lise Charmel, entreprise familiale positionnée sur le haut de gamme et connue pour ses guipures ouvragées, a conservé en France ses ateliers de création et de modélisme, mais fait surtout fabriquer ses produits en Bulgarie, hormis les dentelles qu'elle commande à Olivier Noyon, à Calais.

Son positionnement sur le créneau du luxe (environ 160 euros pour une parure) lui a permis de résister à la baisse du marché.

"Nos ventes ont progressé de 6% l'an dernier. Nous avons été moins touchés par la crise car notre clientèle dispose de revenus plus élevés", a déclaré à Reuters son directeur général Olivier Piquet, évoquant cependant une fin 2011 très difficile.

"Il y a toujours une demande, même dans les moments difficiles, pour les produits de haute technicité et de grande qualité", a-t-il ajouté.

Le groupe Chantelle, leader français du marché (Chantelle, Passionata, Darjeeling, Orcanta), reste une entreprise familiale, comme Simone Pérèle, alors que nombre d'autres noms ont été rachetés : Barbara par le sud-coréen Namyeung Vivien Corp, ou Aubade par le suisse Calida.

L'année 2011 a aussi été marquée par la mise en liquidation judiciaire de Lejaby (racheté en 2008 par l'autrichien Palmers) après la fermeture de trois sites de production en France.

Plusieurs de ses cadres dirigeants ont déposé un projet de reprise de l'entreprise, défendant la préservation du dernier site français de la société, en Haute-Loire.

(dité par Dominique Rodriguez

par Pascale Denis