* La glace fondue regèle plus vite que l'eau de mer en hiver

* La banquise en Arctique est au contraire en recul

par Alister Doyle

OSLO, 1er avril (Reuters) - L'extension de la banquise autour de l'Antarctique en hiver pourrait s'expliquer par un regel rapide des eaux fondues en été sous la calotte glacière, estime un rapport publié dimanche pour l'Institut météorologique royal des Pays-Bas.

Les spécialistes du climat ont du mal à expliquer ce phénomène paradoxal de progression de la banquise aux abords de l'Antarctique, progression qui a atteint un record à l'hiver 2010, alors que parallèlement, la glace dans l'océan Arctique n'a jamais atteint une surface aussi faible en 2012.

"La banquise autour de l'Antarctique est en augmentation malgré le réchauffement climatique mondial. C'est provoqué par la fonte des couches de glace du dessous", explique Richard Bintanja, qui a dirigé la rédaction du rapport dont les conclusions ont été publie dans la revue Nature Geoscience.

Sous la calotte glacière, la glace est constituée d'eau douce et quand les couches de glace à la périphérie de l'Antarctique fondent en été, l'eau provenant de la fonte forme une couche froide qui flotte sur l'eau de mer salée, plus chaude et plus dense, explique l'étude. En hiver, l'eau de fonte devient glace facilement parce qu'elle gèle à zéro degré, par dessus l'eau de mer qui gèle à -2°C.

Au plus fort de l'hiver en septembre, la glace sur la mer autour de l'Antarctique couvre environ 19 millions de kilomètres carrés, soit une zone plus grande que celle de l'Antarctique. Elle fond ensuite dans l'océan à l'approche de l'été.

SUBLIMATION

Le chercheur Paul Holland du British Antarctic Survey (BAS) maintient pour sa part ses conclusions rendues publiques l'an dernier selon lesquelles un déplacement des vents liés au changement climatique éloigne l'eau fondue des côtes vers le large, ce qui permet à l'eau dans certaines zones exposées de geler et de ce fait d'augmenter la quantité de glace de la banquise.

Il concède toutefois que l'augmentation de la quantité de banquise peut être due aux deux effets (vents et eau fondue déplacée), mais il estime que c'est son hypothèse qui explique l'essentiel du phénomène.

Par ailleurs, d'après le rapport de dimanche dirigé par Richard Bintanja, la couche d'eau de fonte limite peut-être la quantité d'eau issue des océans qui retombe en neige sur l'Antarctique. L'air froid peut être moins porteur d'humidité que l'air chaud.

Le Groupe d'experts intergouvernemental des Nations unies sur l'évolution du climat (Giec) estime que le niveau de la mer augmentera entre 18 et 59 cm au XXIe siècle, voire plus si la fonte des neiges s'accélère en Antarctique et au Groenland.

Selon le rapport néerlandais publié dimanche, l'Antarctique perd environ 250 tonnes de glace par an, soit l'équivalent d'une hausse du niveau de la mer de 0,07 millimètre par an, souligne Richard Bintanja. "La perte de masse de l'Antarctique semble s'accélérer", dit-il.

Selon une autre étude parue dans Nature Geoscience, les chutes de neige sur l'Antarctique ont été surestimées d'une quantité comprise entre 11 et 36,5 milliards de tonnes par an, en raison des vents violents qui se sont abattus un peu partout et qui créent un environnement propice à la "sublimation" de la neige, c'est-à-dire à son passage de l'état solide à l'état gazeux sans passer par l'étape liquide, écrit une équipe de chercheurs américains.

Pour ce rapport :

http://www.nature.com/doifinder/10.1038/ngeo1767 (Danielle Rouquié pour le service français)