Les premières salves ont été tirées dans une bataille judiciaire irlandaise de 2,5 milliards d'euros (2,7 milliards de dollars) entre certains des plus grands loueurs d'avions du monde et leurs assureurs au sujet d'environ 80 jets bloqués en Russie.

La Haute Cour de Dublin a entamé au début du mois l'instruction de cette affaire qui, selon les avocats, devrait durer de nombreux mois.

Voici les principaux arguments avancés par les deux parties :

LES AVIONS SONT-ILS PERDUS ?

Les bailleurs ont radié des milliards d'euros de leurs bilans après que les compagnies aériennes russes n'ont pas restitué leurs avions, et ils affirment qu'il n'y a aucune perspective réelle de récupération. Mais certains assureurs affirment que les jets pourraient être restitués à l'avenir et que les bailleurs ont subi une "perte de papier" plutôt qu'une "perte physique".

Les assureurs soutiennent que les actions en justice sont prématurées et rappellent que les bailleurs ont conclu des accords avec la Russie concernant certains des avions piégés, pour un montant total de plus de 2,5 milliards de dollars à ce jour.

QUELLE EST LA CAUSE DU SINISTRE ?

L'un des points essentiels de l'affaire est de savoir si les actions du gouvernement russe ont été la cause principale de l'échec des compagnies aériennes à restituer les avions ou si le désir des compagnies aériennes d'en conserver la possession a joué un rôle.

Cela pourrait déterminer si les demandes d'indemnisation doivent être faites au titre de la police "risques de guerre", plus étroite, ou de la police "tous risques", plus large, et si une demande d'indemnisation valable peut être faite au titre de l'une ou l'autre des polices, ont déclaré les avocats.

QUAND LES PERTES ONT-ELLES COMMENCÉ ?

Les avis des assureurs retirant la couverture du risque de guerre pour la Russie ont commencé à prendre effet le 8 mars. Mais un avocat représentant les bailleurs a déclaré que les clients étaient déjà "sous l'emprise du péril" avant cette date, arguant que le sinistre s'était déjà effectivement produit.

Les bailleurs évoquent leurs tentatives, pour la plupart infructueuses, de reprendre possession des avions, qui ont commencé dès l'adoption des sanctions de l'UE, le 25 février 2022. Les avocats de certains assureurs ont accusé les plaignants de ne pas avoir précisé la date de survenance du sinistre.

QUELLES SONT LES POLICES D'ASSURANCE CONCERNÉES ?

Les avocats des assureurs ont fait valoir qu'en cas de sinistre, la principale police d'assurance pertinente est celle détenue par la compagnie aérienne qui loue l'avion et que toute demande d'indemnisation doit être adressée à ces assureurs, principalement russes.

Les loueurs affirment que leurs efforts pour obtenir des indemnités au titre de ces polices ont échoué, mais les assureurs de l'affaire répondent que cette voie est loin d'être épuisée.

Les loueurs affirment que leurs demandes d'indemnisation devraient être réglées dans le cadre d'une "couverture conditionnelle" qui, selon eux, devrait intervenir si les polices détenues par les compagnies aériennes russes ne parviennent pas à verser les indemnités. Ils ont également suggéré que les créances soient couvertes par une "garantie possédée", qui couvre les risques pendant la reprise de possession d'un aéronef. (1 $ = 0,9363 euro) (Reportage de Conor Humphries et Padraic Halpin ; édition de Barbara lewis)