Il est vrai que sa situation semble en 2025 autrement moins favorable qu’en 2010. Son échelle était à l’époque incomparable en Europe, tandis que Volkswagen se préparait à pénétrer sérieusement le marché nord-américain et que le marché chinois offrait aux constructeurs allemands très populaires sur place des perspectives de croissance en apparence illimitées.

Le vent a tourné, comme chacun sait. Sur le Vieux Continent, des régulations sans queue ni tête ont mis les constructeurs en difficulté et causé une dégringolade des ventes. Comme l’annonçaient tous les industriels avant de se rallier au gospel de la bienséance environnementale sous la pression des politiques, les alternatives électriques sont encore loin d’offrir de nouveaux débouchés capables de compenser le manque-à-gagner. 

En Chine, les constructeurs locaux ont comblé leur retard en matière de R&D et atteint un niveau d’excellence manufacturière qui ferait rougir plus d’un de leurs concurrents européens, américains ou japonais. Aux Etats-Unis enfin, Volkswagen a connu un faux départ et été très sévèrement puni pour avoir triché aux tests d’émissions. 

Il y a une voie vers le salut. Elle consiste à pivoter — cette fois-ci pour de bon — vers l’Amérique du Nord, et à mutualiser ses infrastructures de production européennes — en nette surcapacité — avec les concurrents chinois qui pourraient ainsi les exploiter pour assurer leur développement sur le Vieux Continent. D’aucuns verraient ici une capitulation ; d’autres une stratégie pragmatique, du reste comparable à celle déjà adoptée par Stellantis. 

Volkswagen publiait hier ses résultats financiers de l’exercice fiscal 2024. L’organisation du groupe est si complexe qu’on ne peut guère que se reposer sur les indicateurs mis en avant par le management pour évaluer sa performance économique. Si l’on s’y fie, le bilan à tirer est que 2024 fut à de nombreux égards bien moins pire qu’escompté. 

Les livraisons de véhicules ne sont que très sensiblement inférieures — moins de 3% — à l’année passée, et le profit d’exploitation consolidé ne recule que €3.4 milliards, de €22.5 à €19.1 milliards. Ce déclin, soulignons-le, est presque entièrement imputable aux chutes de prix observées sur les segments premium Audi et Porsche. 

A noter également une baisse du profit de la division financement qui passe de €3.8 à €3.1 milliards, conséquence directe des remises aux clients qu’a dû accorder le groupe pour défendre ses parts de marché. Dans un registre plus satisfaisant, le portefeuille de marques « core » — c’est-à-dire Volkswagen, Skoda et Seat — affiche une bonne résilience, tandis que la filiale Traton continue elle aussi sur sa lancée. 

Le directeur général Oliver Blume a prévenu qu’il serait prématuré d’espérer une inflexion en 2025. Il a en revanche présenté des objectifs à horizon 2030 extrêmement ambitieux. Titanesque, l’ampleur de la tâche pour les atteindre ne pourra manquer de susciter des appréhensions chez les investisseurs. 

Voir également Volkswagen AG : Valorisation au rabais, publié en septembre dernier dans ces mêmes colonnes.