Si la spéculation devait avoir un nom, ce serait probablement celui de Rodriguez. Capable de gagner 138,97% ou 87% en une séance (celles du 8 avril et 17 août) puis d’enchaîner de violentes corrections, le titre a affolé les compteurs à plusieurs reprises au cours de l’année.
Partie à la dérive depuis plusieurs années, le spécialiste des yachts de luxe a collectionné les déboires et connu une descente aux enfers dont il a bien failli ne pas revenir. La crise a fait sombré le secteur et touché de plein fouet Rodriguez déjà fragilisé par une situation financière tendue. Sur l’exercice 2008/2009, le groupe accuse une perte opérationnelle de 119 millions pour un chiffre d’affaires de 109 millions d’euros. Le bilan laisse apparaître des capitaux négatifs
En avril 2009, Rodriguez Group doit se placer sous la procédure de sauvegarde, le temps de trouver une issue à son impasse. Le groupe se restructure autour de trois axes principaux : la réduction des coûts pour abaisser son niveau de point mort, l’adaptation du modèle économique pour générer du cash et diminuer le besoin en fonds de roulement et la restructuration financière. Sur ce dernier point, le groupe a obtenu l’abandon de 54,3 millions d'euros de créances (ce qui se traduira par un profit exceptionnel du même montant en 2009-2010) et des intérêts sur dix ans. Les 139,3 millions d'euros restant à rembourser le seront, pour moitié via une émission d'obligations convertibles ou remboursables en numéraire à partir de 2017 et pour moitié via un rééchelonnement sur les dix prochaines années.

Le 7 avril 2010, soit un an plus tard, la procédure de sauvegarde est levée. L’action cote à nouveau le 8 avril avec le succès qu’on lui connaît (+138,97%).
Le soufflé retombe vite et le titre s’effondre à nouveau lorsque le groupe est confronté, deux mois plus tard, au départ de son dirigeant, fils du fondateur, mis en examen dans une affaire en relation avec le grand banditisme. Le titre retourne dans les profondeurs du début 2009.
Rodriguez doit son salut aux chiffres du troisième trimestre : après trois années calamiteuses, Rodriguez annonce une progression de 17,7% de son chiffre d’affaires. Un nouveau virage pour la société ?
Le dernier trimestre confirme l’embellie, le chiffre d’affaires a progressé de 3,2% à la faveur d’une "reprise du marché du yachting de luxe". Il reste cependant en baisse de 20,4% sur l’ensemble de l’exercice.

Beaucoup d’incertitudes entourent ce dossier. Mais un vent d’optimisme se lève. A l’occasion du salon nautique de Paris, la Fédération des industries nautiques annonce que « le marché du nautisme est en cours de stabilisation et la production française a renoué avec la croissance sur la saison 2009-2010 …. tirée essentiellement par l'export ».
Rodriguez est attendu le 14 décembre prochain, date d’une conférence à destination de la presse et des analystes. A cette occasion, le groupe reviendra sur les mesures de restructuration, les chiffres de l’activité 2010 et dévoilera sa stratégie pour les prochaines années. De quoi alimenter un nouveau courant spéculatif ?

Techniquement, la tendance n’est plus baissière depuis la reprise des cotations en avril dernier et l’envolée des cours au-delà des moyennes mobiles hebdomadaires. La configuration s’apparente désormais à un triangle de consolidation entre 3,85 et 5,8 EUR. Un potentiel de 50% alors que le triangle est largement amorcé, ce n’est pas courant. Mais rien de surprenant dans le cas de Rodriguez, habitué à ce type d’excès.
A court terme, la volatilité se resserre entre 4 et 5 EUR ; ce type de configuration précède généralement des accélérations de tendance. A quelques jours de la conférence, ce titre pourrait à nouveau bénéficier d’un courant spéculatif. On surveille les bornes 3,85/5,8 EUR, la médiane des 5 EUR, mais surtout le retour des volumes pour revenir sur ce dossier, forcément réservé aux plus audacieux des investisseurs.