Avec l’exercice fiscal décalé au Japon, Nintendo a dévoilé un bilan couvrant la période d’avril à décembre 2024, permettant d’avoir un aperçu anticipé de l’année complète. Et sans surprise, la firme japonaise est bel et bien en phase de transition. Mais loin d’être alarmiste, le marché voit surtout ce ralentissement comme une parenthèse avant le début d’un nouveau cycle porté par la prochaine génération de consoles.
Des investisseurs tournés vers 2025
Sur l’année civile 2024, la Switch, toutes versions confondues, s’est écoulée à 11,5 millions d’exemplaires, en baisse de 32 % par rapport à 2023. Une tendance similaire se retrouve sur les ventes de jeux, qui atteignent 159,7 millions d’unités, en recul de 22 %. Ce ralentissement se traduit directement dans les comptes de Nintendo : son bénéfice d’exploitation entre avril et décembre 2024 s’élève à 247,6 milliards de yens (1,59 milliard de dollars), contre 464 milliards sur la même période en 2023, soit une chute de 46,7 %.
Face à ces chiffres, Nintendo a révisé à la baisse ses prévisions de bénéfices annuels, les ajustant de 22,2 % pour l’exercice fiscal qui se clôturera fin mars. Du côté des jeux, seuls 12 titres ont dépassé le million d’exemplaires vendus en 2024, contre 17 en 2023. Pourtant, l’action Nintendo continue de grimper, enregistrant une hausse de 2,2 %, flirtant avec ses plus hauts historiques. Mieux encore, la valorisation du groupe atteint 33 fois ses bénéfices, bien au-dessus de son ratio habituel des cinq dernières années, qui oscillait autour de 15.
Un nouveau cycle à venir
Nintendo n’a pas de raison de paniquer : la Switch touche à la fin de son cycle de vie, mais sa succession est déjà prête. En avril 2016, l’annonce de cette console hybride entre salon et portable avait marqué un tournant, offrant une réponse intelligente aux échecs de la Wii U. Pari réussi : avec plus de 150 millions d’exemplaires écoulés, la Switch est aujourd’hui la troisième console la plus vendue de tous les temps. Et après huit ans de bons et loyaux services, il est temps pour elle de passer le relais à la Switch 2.
Les premiers aperçus de cette nouvelle génération sont tous récents et son prochain rendez-vous médiatique est prévu pour le 2 avril, où Nintendo pourrait enfin en dévoiler la date de sortie. En attendant, la fin d’année fiscale sera marquée par la sortie de titres revisités issus du catalogue Wii U. La sortie de la Switch 2 pourrait bien s'accompagner de blockbusters comme Pokémon Legends ZA (l’IP la plus lucrative du monde) et Metroid Prime 4 Beyond, deux jeux très attendus et prévus pour 2025. Les rumeurs évoquent également un nouvel opus de Mario Kart, notamment parce que la licence figurait dans le premier trailer de la Switch 2. Il faut dire que Mario Kart 8 Deluxe reste le plus grand succès de la Switch avec 67,35 millions de copies vendues, devenant ainsi la deuxième meilleure vente de l’histoire de Nintendo.
Une diversification à petits pas
Nintendo reste une valeur cyclique, ses résultats évoluant au rythme des générations de consoles. Mais la firme japonaise cherche à lisser ses revenus en capitalisant sur ses licences emblématiques bien au-delà du jeu vidéo. Films, parcs d’attractions… Le groupe élargit progressivement son écosystème, avec une approche prudente mais efficace.
Le succès du film Super Mario Bros. a conforté Nintendo dans cette stratégie. Un deuxième volet est déjà en préparation pour 2026, tandis qu’un long-métrage basé sur The Legend of Zelda est en développement. Du côté des parcs d’attractions, l’engouement est au rendez-vous, notamment auprès des touristes étrangers venant visiter le Nintendo World du Japon. L’expansion se poursuit avec l’ouverture d’une nouvelle zone en décembre dernier, et surtout, l’inauguration d’un second parc Nintendo World le 22 mai 2025 à Orlando, au sein du complexe Universal Epic Universe. Comme l’expliquait notre rédactrice Odile Dubois, cette diversification se fait « lentement mais sûrement », une approche qui séduit les investisseurs.
Une concurrence plus rude que jamais
Si l’excitation autour de la Switch 2 est réelle, il faut toutefois tempérer les attentes. Le prix de la console reste inconnu, et il s’agissait d’un argument clé du succès de la première version en 2017. Par ailleurs, le marché a évolué et Nintendo ne bénéficie plus du même boulevard qu’à l’époque.
En mars 2017, la Switch a introduit un format hybride inédit, qui lui a permis de s’imposer sans réelle concurrence. Sony, refroidi par l’échec de la PS Vita, avait abandonné l’idée d’une console portable, laissant à Nintendo le champ libre sur ce segment. Du côté des consoles de salon, la Switch se positionnait sur une gamme de prix bien inférieure à celle des PlayStation et Xbox, devenant une machine complémentaire pour de nombreux foyers.
Mais en 2025, la donne a changé. Le succès de la Switch a inspiré d’autres acteurs, à commencer par Valve. Le géant du jeu PC a lancé le Steam Deck, une console portable capable de faire tourner des jeux PC, avec l’ensemble du catalogue Steam à disposition. Cette percée a ouvert la voie à un nouveau marché où se côtoient désormais des machines comme l’Asus ROG Ally ou la Lenovo Legion Go. Avec cette concurrence plus féroce, la Switch 2 devra convaincre au-delà du simple attrait de l’écosystème Nintendo.